Castor fiber
Royaume
Phylum
Subphylum
Classe
Commande
Famille
Genre
ESPÈCES
Castor fiber
Taille de la population
Unknown
Durée de vie
10-25 years
Vitesse de pointe
55
34
km/hmph
km/h mph 
Poids
11-30
24.2-66
kglbs
kg lbs 
Longueur
80-100
31.5-39.4
cminch
cm inch 

Castor d'Europe, Castor commun, Castor d'Eurasie

Le castor d'Europe, castor commun ou castor d'Eurasie (Castor fiber Linné), jadis appelé bièvre, est une espèce de mammifère aquatique de la famille des Castoridae. C'est le plus grand rongeur autochtone d'Eurasie et de l'hémisphère Nord. Son apparence est très semblable à celle du castor du Canada.

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Si l'origine des castors remonte à 54 millions d'années, les espèces actuelles Castor fiber et Castor canadensis auraient divergé il y a environ 7,5 millions d'années, lors de la colonisation de l'Amérique du Nord par une population probablement restreinte originaire d'Eurasie.

Dans presque toute l'Eurasie fraîche et tempérée, depuis au moins 5 millions d'années et jusqu'à il y a 10 000 ans environ, le Castor d'Europe a joué un rôle majeur dans la configuration des paysages et des écosystèmes et en particulier des hydrosystèmes de plaine alluviale, mais aussi de moyenne et basse montagne. Ses aménagements ont donné leur forme à de nombreuses forêts, ont sélectionné les arbres des zones humides (tous aptes à recéper), ont conditionné l'existence d'une grande partie des zones humides, de la flore des berges et de la faune associée. Il a eu une influence majeure sur la forme des cours d'eau, de la basse montagne jusqu'aux estuaires, où l'on peut encore trouver des traces fossiles d'avulsion et de barrages,, sur la constitution de nombreuses tourbières, couvrant des surfaces importantes et devenus des puits de carbone majeurs en zone subpolaire, de certaines nappes phréatiques. Ces effets ont été particulièrement importants durant les trois précédentes périodes interglaciaires et durant le Tardiglaciaire, au point qu'il faille reconsidérer une partie des données paléoenvironnementales et paléopaysagères, traditionnellement attribuées aux changements climatiques ou à l'anthropisation durant l'âge de la pierre en Europe. Certains grands changements écopaysagers ne seraient simplement ni climatiques, ni d'origine humaine mais auraient comme source l'activité des populations de castors,,. Il a joué ce rôle jusqu'à sa quasi-disparition à la fin du XIXe siècle. De la fin de la Préhistoire au Moyen Âge la destruction par l'homme des castors et de leurs infrastructures de barrages ont eu diverses conséquences écopaysagères négatives.

Après avoir failli disparaître, Castor fiber a été classé espèce protégée dans plusieurs pays (dont la France, la Belgique, la Suisse et le Luxembourg), lui permettant de commencer à reconquérir une partie de ses habitats : les cours d'eau, les zones humides, les tourbières, les lacs, les étangs d'Europe et d'Asie. Il a fait l'objet d'opérations de réintroduction dans certains pays. Il reste néanmoins vulnérable en raison d'un récent effondrement de sa diversité génétique.

Cette « espèce-ingénieur »,,, des écosystèmes est aussi une «espèce-clé» et facilitatrice, en raison de sa capacité à retenir l'eau par ses barrages et à accroître la biodiversité en complexifiant et en ouvrant certaines parties des ripisylves, permettant l'expression d'une flore et d'une faune plus héliophiles. Capable de régénérer ou d'augmenter la diversité des espèces localement et à des « échelles paysagères », il est considéré comme un « auxiliaire » de la renaturation et « revitalisation » des cours d'eau, nécessaire à la restauration écologique et à la vie sauvage des cours d'eau,,.

De très nombreux noms de lieux de la zone tempérée d'Europe (voir « Articles connexes » en bas de page) attestent de sa présence à l'époque historique ou préhistorique, y compris en des lieux où il n'est plus présent aujourd'hui, par exemple sur la Bièvre, une courte rivière de 35 km qui se termine de nos jours dans les égouts de Paris (rive gauche).

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No

Nocturne

He

Herbivore

Ph

Phyllophage

Li

Lignivore

Se

Semi-aquatique

Pr

Précocial

Te

Terrier ("a burrow" - not an adjective)

Na

Nageur

Te

Territorial

Vi

Vivipare

Mo

Monogame

So

Social

Do

Dominant

No

Non migrateur

E

commence avec

Apparence

De loin ou dans l'eau, il peut être confondu avec le rat musqué ou le ragondin (dont le corps est toutefois moins immergé quand il nage ; le castor ne laisse visible hors d'eau que sa nuque et la moitié supérieure de la tête, alors que toute la tête et le haut du dos du ragondin émergent). Le rapport longueur de tête/longueur du corps (sans queue) est d'environ un cinquième pour le castor et d'un tiers pour le ragondin. Le risque de confusion peut poser problème car le retour du castor se fait dans un environnement où rats musqués et ragondins sont souvent présents et ces derniers, en tant qu'espèce exotique envahissante, peuvent être chassés ou piégés.

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En France, un adulte pèse de 16 à 28 kg selon l'INPN et 21 kg en moyenne selon l'ONCFS ou 15 à 35 kg selon A. Nolet,, ; pour 300 à 500 grammes à la naissance. En Finlande où cohabitent le C. fiber et C. canadensis (introduit), le poids moyen d'une femelle C. Fiber pleine est de 23,2 kg (de 17,0 à 31,0 kg), celui d'une femelle non-enceinte de 13,0 kg (de 2,9 à 21,5 kg) et d'un mâle (14,9 kg, de 5,7 à 26 kg). Ces chiffres sont proches de ceux de Hinze (1950) pour C. canadensis (qui en zone froide pèse en moyenne 15,1 kg, 15,3 kg (pour une femelle adulte) et 8,1 kg pour un jeune mâle, et 7,4 kg pour une femelle d'un an). Ce poids varie saisonnièrement, augmentant en automne où des graisses sont stockées dans la queue.

Sa croissance semble terminée à l'âge de 3 ou 4 ans, comme celle de son cousin américain.

Il mesure en France jusqu'à 1,35 mètre (queue d'environ 30 cm (29 à 31 cm) comprise) ce qui en fait le plus gros rongeur autochtone européen. Le record actuel serait de 38 kg pour un castor du Rhône.

Il est depuis longtemps constaté une augmentation de la taille moyenne selon un gradient Est-Ouest (de l'Asie à l'Europe de l'Ouest) et aussi (« contrairement à la règle de Bergmann ») selon un gradient nord-sud, sans que l'on sache à ce jour si ces variations sont d'origine génétique ou liée aux contextes bioclimatiques. Ces différences sont utilisées par les gestionnaires pour le maintien d'une diversité génétique au sein de la métapopulation.

Cet animal est doté d'une bonne vision nocturne mais aussi d'une vision diurne lui permettant de discriminer les couleurs, ce qui incite à le classer comme semi-nocturne plutôt que nocturne (quand il n'est pas dérangé, il est plus actif le jour et l'est nécessairement près du cercle polaire où le soleil de minuit fait qu'il n'existe plus de vraie nuit en été).

La recherche de nourriture, ses déplacements de nuit ou dans le noir de sa hutte ou de son terrier sont facilités par un excellent odorat, une bonne ouïe et des moustaches et des poils tactiles (vibrisses) situés au niveau des sourcils.

Il est très dense (12 000 à 23 000 poils/cm2) et composé de deux sortes de poils, l'un étant plus long, lisse et dur, et l'autre un fin duvet). Sa couleur varie du blond à reflets roux à une couleur foncée (plus au nord et à l'est de l'Europe). La mue se produit d'avril à juillet. Selon l'Encyclopédie cynégétique d'Henri Agasse (1794), dans les contrées du nord les plus reculées les castors étaient « tout noirs », mais « Il s'en trouve aussi quelques-uns tout blancs ; les fourrures des noirs sont les plus belles et les plus estimées ».

Elle est relativement trapue au sol et fuselée dans l'eau.

Ses mains (pattes antérieures) longues de 5 cm, sont munies de cinq doigts griffus non palmés, aptes au fouissage, avec un pouce opposé facilitant la préhension. Le premier doigt est rudimentaire, évoquant un ongle long et recourbé ne touchant pas le sol quand l'animal marche, les autres ongles sont plus forts et, sauf le second, émoussés par l'usage. La paume porte sous le premier doigt un coussinet rigide et épais qui renforce la préhension. Au repos le pouce est enfermé dans la paume, comme chez les primates

Le pied (de 15 cm) possède 5 doigts complètement palmés, avec un ongle double au second doigt, lui servant de « peigne » quand il entretient sa fourrure.

Sa queue plate est remarquable pour un mammifère.

Elle est noire, plate, ovale, épaisse et musculeuse, large de 13 à 16 cm et longue d'environ 30 cm ; elle cache 24 vertèbres. Elle lui sert d'outil (contrepoids lors des déplacements de matériaux, traîneau pour les jeunes), de propulseur et de gouvernail, mais aussi de réserve hivernale de graisse et d'échangeur thermique (il la plonge dans l'eau fraîche quand il fait chaud,). Cette queue est protégée par des écailles ou de pseudo-écailles sur les 2/3 de sa longueur et couverte de poils à sa jonction avec le corps.

Sa formule dentaire est décrite comme suit : 1 incisive, 1 prémolaire et 3 molaires par demi-mâchoire.

Comme chez le castor américain, il n'existe pratiquement pas de dimorphisme sexuel apparent. La femelle porte deux paires de mamelles et chez les deux sexes, un seul orifice (uro-anal et génital constitue le débouché d'un pseudo cloaque).

La seule méthode de sexage sûre, non invasive et ne nécessitant pas de capture est l'analyse génétique (à partir de poils en général). Sinon, l'observation des mamelles ou du comportement est utilisée :

Selon une étude finlandaise, les mâles passent un peu plus de temps à voyager, ils patrouillent plus loin que les femelles. Ils passent probablement plus de temps à marquer la périphérie éloignée de leur territoire.

Les comportements et le marquage odorant diffèrent selon le sexe des individus ; quel que soit le type d'habitat, les mâles et femelles utilisent leurs glandes odorantes qui, ensemble, ont un poids semblable quel que soit le sexe. Les glandes anales du mâle sont cependant nettement plus développées que celles des femelles, alors que ceux-là ont des sacs odorants plus petits que celles-ci. Le fait de passer plus de temps à marquer son territoire diminue la taille des sacs odorants, ce dimorphisme sexuel pourrait donc provenir d'un dimorphisme comportemental.

Chez un castor mort ou capturé puis endormi, la présence/absence de l'os pénien, identifiable par l'exploration du cloaque ou par échographie interne renseigne sur le sexe de l'individu.

Les glandes anales produisent du castoreum stocké dans deux poches et jouant au moins un rôle majeur sur le plan de la communication olfactive. Les orifices uro-anaux et génitaux débouchant dans la même cavité (pseudo cloaque).

Les excréments, encore riches en résidus de matière ligneuse, allongées, mesurent 2 × 3 cm environ ; elles sont émises dans l'eau où elles nourrissent les poissons et divers invertébrés.

Peu de données sont disponibles au sujet des castors sauvages ; le castor vivrait de 15 à 20 ans. En captivité, il a dans un cas au moins vécu 24 ans

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Vidéo

Distribution

Géographie

Cette espèce a un rapport particulier à son environnement, puisque capable de le créer et améliorer son habitat. Pour s'établir durablement, cet animal semi-aquatique, a besoin d'eau permanente (60 cm de haut au minimum). Si le niveau de l'eau descend en été, il construit une digue pour l'élever de manière que l'entrée de son gîte soit toujours immergée et invisible. Il a besoin de branches qu'il se procure sur les arbres et buissons rivulaires (saules, aulnes, ormes, peupliers…) des cours d'eau, lacs étangs ou zones humides boisées.

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Dans les cours d'eau et certains étangs (de la basse montagne aux approches des zones saumâtres près des littoraux) il peut soit construire une hutte, ainsi qu'un barrage si le niveau de l'eau est très bas, soit (en zone non rocheuse) creuser un terrier. Il doit disposer d'assez de bois sur les berges et à leurs abords (de 2 à 15 m environ). Il peut coloniser de petits cours d'eau voire des fossés de drainage où il peut éventuellement faire monter le niveau de l'eau grâce à un barrage. Plus rarement il s'installe dans une cavité karstique (voire dans une ruine de moulin) et l'ONCFS signale des populations vivant à 600 m d'altitude dans le Gard, à au moins 1 000 m en Haute-Ardèche et un couple qui vivait à 2 000 m d'altitude dans les alpes vaudoises.

Quand il n'a pas besoin de construire de barrage, le castor peut être très discret. Il est souvent d'abord repéré par des indices de présence pouvant si nécessaire être confirmée par imagerie nocturne (appareil photo ou caméra infra-rouge ou à amplification lumineuse, associée à un détecteur de présence) :

  • bois coupé sur pied, rognures éparpillées au sol avec marques caractéristiques de dents ;
  • bois coupé flottant ;
  • écorçage sur pied ou sur bois coupé et/ou sur racine ;
  • réfectoires ;
  • coulées, accès de berges avec traces de pattes ;
  • gîte principal ou secondaire ;
  • barrage et huttes (plus rares en Europe qu'en Amérique du Nord) ;
  • traces monticules de marquage de territoire (plus discret) ;
  • signalement d'un cadavre (exemple : 72 cas de mortalité signalés à l'ONCFS en France en 2012, 65 en 2011, 49 en 2010, 34 en 2009, principalement dans les Alpes et le nord-est du pays, avec pour 2012 : 47 % de mort par collision routière, 32 % de cause indéterminée et « 7 cas de noyade, 1 collision avec un bateau, 2 cas de braconnage, 2 cas d'erreur de tir, 2 cas d'empoisonnement et 1 cas de mortalité par des chiens ») ou de dégâts (exemple : 13 signalements en 2012 en France, concentrés dans 4 départements.

Divers moyens de suivi télémétriques ont été utilisés pour suivre des individus ou petits groupes de castors, mais c'est un animal qui se débarrasse facilement des émetteurs externes qui doivent en outre résister à son mode de vie semi-aquatique et fouisseur. Des transpondeurs internes (chirurgicalement implantés) ont été utilisés,.

On le trouve aujourd'hui en Europe, au nord d'un axe incluant la France et la Russie, particulièrement sur les rives du Rhône, de l'Elbe et du Danube, ainsi qu'en Scandinavie.

Victime de la chasse, il avait au milieu du XXe siècle presque disparu de toute l'Europe : on estime la population à seulement 1 200 individus dans toute l'Eurasie. Des mesures de protection de l'espèce et théoriquement de son habitat furent prises en France dès 1909, et dans divers pays, avec des réintroductions, comme en Scandinavie dès les années 1925-1935, suivies d'autres séries de réintroductions ou recolonisations naturelles sur certains cours d'eau dans de nombreuses régions d'Europe. Ces réintroductions lui ont permis de recoloniser certains de ses habitats.

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Castor fiber carte des habitats
Castor fiber carte des habitats
Castor fiber
Public Domain Dedication (CC0)

Habitudes et mode de vie

Son comportement social et de constructeur fascine l'homme au moins depuis l'Antiquité. Le castor a souvent été présenté comme un modèle du travailleur consciencieux, infatigable et prévoyant, voire d'intelligence sociale et d'ingéniosité. La part de l'autonomie, du social et de l'instinct (déterminisme) a été longtemps discutée et a donné lieu à de nombreux textes et interprétations, aboutissant peu à peu à une vision plus rationnelle (activité de construction motivée par l'horloge interne et divers stimuli, avec selon Richard PB (1964) quelques schèmes-moteurs très simples, puis plus écosystémique avec la considération de son rôle d'espèce-« clé », « ingénieur » et « facilitatrice » dans l'écosystème et sur le long terme.

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Animal semi-aquatique : inféodé aux zones humides, il passe les deux tiers de son temps dans l'eau, avec des apnées de 4 à 6 minutes, et exceptionnellement (jusqu'à 15 minutes). Comme de nombreux animaux nocturnes, il est surtout actif en début et en fin de nuit. Quand il est sur terre, il passe la majeure partie de son temps à moins de 6 m de l'eau où il se réfugie s'il se sent menacé.

Plongées : Graf et ses collègues ont utilisé des accéléromètres et des capteurs de profondeur pour étudier son comportement en plongée (pour 12 castors eurasiens de Norvège, de 2009 à 2011) ; Les plongées étaient généralement courtes (<30 s) et peu profondes (<1 m) et donc probablement le plus souvent « aérobies ». Lors de la descente, l'accélération moyenne vectorielle dynamique du corps (indice de puissance du mouvement) était plus élevée près de la surface, et de manière inattendue cet indice était plus élevé à la remontée (phénomène encore à expliquer). Comme d'autres homéothermes, la durée de plongée tend à augmenter avec la profondeur. La température de l'eau n'a pas affecté le comportement de plongée. Ses capacités (profondeur, durée) sont donc semblables à celles d'autres animaux plongeurs d'eau douce semi-aquatiques, mais s'ils ne sont pas dérangés ils plongent peu (seulement 2,8 % de leur temps d'activité, probablement parce que l'essentiel de leur nourriture est trouvée sur terre).

Comportement territorial : monogame, grégaire et sociable, il marque et défend son territoire ; 75 % des castors vivent en groupes familiaux composés de 2 adultes, des jeunes de plus d'un an et des jeunes de l'année. Une famille rassemble de 2 à 6 castors (3,8 en moyenne en Europe). 25 à 30 % environ des castors vivent solitairement, avec des comportements plus explorateurs. Chaque communauté familiale (2 parents, les jeunes de l'année et les jeunes de l'année précédente, soit 4 à 6 castors par territoire) défendent 1 à 3 kilomètres de cours d'eau (moins dans les milieux très bioproductifs et plus dans les milieux pauvres).

Territorialité : Dans un environnement sauvage, libre et leur convenant, des castors relâchés recolonisent le milieu selon un modèle dit de « répartition despotique idéale » (c'est-à-dire que les premiers arrivants s'installent dans les habitats leur convenant le mieux en qualité et en taille ; les suivants colonisent des habitats plus pauvres. Quand ces milieux sont utilisés - les nouveaux individus sont des vagabonds qui doivent attendre qu'une place se libère, chercher un nouveau territoire (autre bassin versant, lac, etc.) et qui souvent ont plus de chance de mourir tôt. Ce type de colonisation est lié à un comportement territorial marqué, qui auto-limite la densité en castors d'un territoire. Les premiers occupants forment des territoires dont la surface varie en « fonction de la saison (petits territoires en hiver, grands territoires au printemps et en été), ce qui correspond bien à la « théorie de la taille optimale des territoires », mais ce pattern ne s'est pas répété chez les colonisateurs plus tardifs » ; ils défendent aussi un territoire plus grand. En été, ils peuvent patrouiller sur de très grandes distances (effectuent jusqu'à 20,0 km par nuit, aller-retour) alors que les territoires d'hiver mesuraient « (7,9 ± 0,9 (erreur standard) km, dont 3,0 ± 0,4 km de berges boisées) » (au-delà les « patrouilleurs » dépenseraient trop d'énergie pour rester en bonne santé). Nolet (1994) observe que toutes les berges ou section de cours d'eau ne sont pas transformées en territoire ; chaque territoire reste séparé d'éventuels territoires amont et aval par une zone tampon (plus petite que les territoires eux-mêmes). Au total, environ la moitié du territoire potentiel est réellement occupé. Selon plusieurs auteurs dont Nolet, « des facteurs sociaux et thermorégulateurs semblent jouer un rôle important dans la détermination des coûts associés à la défense territoriale, et donc à la taille des territoires ».

Olfaction : l'odorat du castor est développé. Il est mobilisé pour le choix de la nourriture et la détection de certains prédateurs et surtout pour le marquage du territoire par des sécrétions du castoréum et des glandes anales qui sont principalement placées sur des « monticules » de terre ou de boue éventuellement mélangée de feuilles réalisés sur la berge (à moins de 50 cm de l'eau) ; plus le linéaire de berge d'un territoire est long, et plus il y a d'autres colonies ou individus à proximité, plus ces monticules sont nombreux, indépendamment de l'âge et du nombre des castors ou de la saison ; sur 286 monticules de marquage odorant suivis dans le Biesbosch, 97,2 % étaient construits par les castors et seulement 2,8 % étaient un marquage déposé sur une roche, une touffe d'herbe ou directement sur le sol. Remarque : Selon Jean-Pierre Quéré, Henri Le Louarn, C. canadensis marque aussi son territoire avec de la boue prélevée dans les cours d'eau, ce que ne ferait pas C. fiber.

Chaque castor discrimine olfactivement les odeurs de sa famille ou laissés par des mâles et femelles,, dominant ou dominé susceptibles d'entrer sur son territoire.La signature olfactive produite par les glandes anales d'un castor révèle à ses congénères des informations faisant ou non de lui un concurrent dangereux ou menaçant pour une famille établie.

L'effet desperado est le nom d'une hypothèse voulant qu'un individu chassé de son territoire devienne un adversaire agressif car il a peu à perdre dans les rencontres agonistes). Cet effet a été recherché chez le Castor, via analyse chimique (par chromatographie en phase gazeuse) d'odeurs individuelles de castors d'âges et de statuts sociaux différents, ainsi que par l'étude des réponses interindividuelles à ces odeurs. Les résultats ont confirmé un lien entre cette odeur et la réaction comportementale, et ils montrent que l'âge, l'appartenance à une famille et le statut social sont bien codés dans l'odeur de chaque castor.

Une autre étude (finlandaise) a montré que le castor semble moins gêné en été par l'odeur de l'homme ou du chien, mais qu'il craint celles du renard roux, de la loutre, du Lynx, du loup et de l'ours brun, qui induisent une moindre recherche de nourriture. Les odeurs de loutre, de renard roux, de lynx, de loup et d'ours brun ont des effets plus marqués en été, alors qu'en automne le castor réagit plus nettement (toujours en diminuant la recherche de nourriture) à celle de la loutre ainsi qu'à celle du lynx, de l'homme et du renard roux. Les odeurs de prédateurs sympatriques et n'ayant pas disparu du territoire du castor semblent les plus efficaces (loutre par exemple). Les auteurs signalent que les castors ont prélevé plus de branches expérimentalement imprégnées d'odeur de prédateur en automne qu'en été. Il a été suggéré que des odeurs pourraient être utilisées pour la gestion ou le contrôle de certaines activités et de la localisation des castors dans les zones où des conflits homme-castor risquent de se produire.

Le gîte : Ce peut être un terrier dans la berge, une « hutte de berge » (quand la berge est trop rocheuse pour être creusée), une « hutte en île » ou encore une « hutte-terrier » (quand le plafond d'un terrier s'est effondré, mettant le gîte à jour ; ce dernier est alors réparé par des branchages formant une hutte) pour s'abriter le jour et mettre bas. L'entrée en est toujours située sous l'eau, ce qui est considéré comme une stratégie défensive. Rarement, le gîte est une cavité naturelle (dans les régions karstiques comme dans les gorges du Gardon) ou artificielle (ruine de moulin).

Un gîte déserté par le castor peut être réutilisé par d'autres espèces : la Martre des pins (Martes martes), le rat musqué, le campagnol, le vison, la loutre (Lutra spp. et Lontra canadensis), ou encore le blaireau européen (Meles meles) et le renard roux qui hibernent parfois dans les terriers abandonnés.

Au Canada, des lynx (Lynx rufus) ont aussi été observés utilisant un gîte abandonné de castor pour mettre bas et y élever leurs petits, ce qui laisse supposer qu'un tel comportement est également possible en Europe.

Construction : Son comportement le plus connu et spectaculaire est — dans certaines circonstances — la construction de barrages et retenues d'eau, rendu possible par une capacité à rapidement ronger des branches et des troncs d'arbres, grâce à des incisives très aiguisées et consolidées par un émail de couleur orangée. Le castor abat en général plusieurs arbres dans un même secteur, produisant une zone de coupe dite « atelier ». Si cette zone de coupe est éloignée de la hutte ou du barrage en construction, il creuse de petits canaux (jusqu'à 1,5 mètre de large et 1 m de profondeur) reliant les différentes zones et permettant la traction sur l'eau de bois pesants.

Si le niveau d'eau baisse il peut en quelques jours construire un barrage faisant en quelque sorte « barrage à la sécheresse ».

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Comportement saisonnier

Régime et nutrition

Elle a fait depuis les années 1930 au moins l'objet de nombreuses études, dans le cadre notamment de la préparation ou de l'évaluation des opérations de réintroduction ou de protection.Même s'il optimise ses choix en fonction des défenses biochimiques naturelles des arbres,, et des ressources locales notamment en été quand la biomasse fraîche est la plus abondante, le castor européen se montre très sélectif dans ses choix alimentaires, y compris quand il vient d'être introduit dans un milieu où il a un large choix au sein de ses espèces alimentaires préférées. Par exemple dans un lac de 15 ha bordé de 5 ha de sylvicultures où ont été réintroduits en 2005 6 castors originaires d'Allemagne, on a étudié les choix d'espèces et de classes d'âge et de diamètres d'arbres les plus souvent choisis par les castors afin de déterminer si ces choix reflétaient la disponibilité locale des ressources. Les résultats ont confirmé que les castors réintroduits étaient très sélectifs quant à l'essence et au diamètre des arbres choisis, et ces choix ne reflétaient pas la biodisponibilité des bois : ils ont choisi des classes de taille similaires parmi quelques espèces préférées, et n'ont pas dans ce cas utilisé de « bois » de sylviculture.

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Bien connaître ces préférences peut aider à protéger les arbres que des propriétaires riverains souhaitent conserver (par un grillage par exemple).

Le castor est réputé exclusivement végétarien mais comme les grands herbivores, il ingère probablement quelques œufs et larves de vertébrés et quelques invertébrés (larves présentes sous les écorces ou dans la végétation aquatique…). Un castor adulte ingère environ 2 kg de matière végétale (ou en hiver 700 g d'écorce) par jour. Il se nourrit essentiellement des tiges et branches de 3 à 8 cm de diamètre et principalement dans la strate basse de la ripisylve où, après quelques années, il entretient souvent une zone plus buissonnante qui offre moins de prise au vent que les grands arbres et permet un ensoleillement plus important du milieu aquatique.

Outre les écorces et plants ligneux qui constituent l'essentiel de son alimentation hivernale, il adapte sa consommation aux ressources locales et saisonnières en feuilles et tiges de ligneuses et de plantes aquatiques (hydrophytes ou hélophytes…), y ajoutant des fruits, des tubercules ou des végétaux qu'il collecte jusqu'à une trentaine de mètres de l'eau (exceptionnellement jusqu'à 50 m). Les « coupes sauvages » réalisées par l'animal, loin de dégrader le milieu naturel, favorisent les éclaircies et la multiplication végétative par rejets ou drageons.

Les provisions faites sous l'eau et les écorces de branches, tiges et troncs de ligneux constituent l'essentiel de son alimentation hivernale ; il peut consommer toutes les essences européennes mais il montre une nette préférence pour les salicacées (Saules, Salix spp. et Peupliers, Populus spp.) sans dédaigner le Cornouiller sanguin (Cornus sanguinea), le Noisetier (Corylus avellana), l'Orme champêtre (Ulmus campestris) quand ils sont présents sur son territoire, ou - mais plus rarement - l´Aulne glutineux (Alnus glutinosa) ou encore certains fruitiers qui auraient été plantés non loin de l'eau (pommiers, poiriers).

Du printemps à l'automne, il consomme de nombreuses herbacées et apprécie notamment l'Armoise (Artemisia vulgaris) et la reine-des-prés.

Les saules et peupliers ont coévolué avec lui depuis plusieurs millions d'années et ont acquis une capacité de recépage telle que là où elles poussent naturellement, elles sont difficilement surexploitables par les castors, comme toutes les espèces des ripisylves de l'hémisphère nord (ce qui n'est pas le cas dans l'hémisphère sud où aucun animal ne se nourrit à la manière du castor en étant capable de couper des tiges et troncs). En coupant les tiges et arbres de la berge et du proche lit majeur pour en faire des barrages ou se nourrir, le castor modifie le cycle de l'eau du bassin versant en favorisant près de l'eau les saules et peupliers. Sinon, il se rabat sur des buissons tels que cornouiller sanguin, noisetier, l'orme champêtre et dans une moindre mesure l'aulne glutineux.

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Habitudes d’accouplement

COMPORTEMENT D’ACCOUPLEMENT

Le castor est monogame. La femelle met bas dans son terrier ou sa hutte, et allaite ses petits grâce à 4 mamelles (qui ne sont visibles que durant la fin de grossesse et la période de lactation). L'olfaction semble jouer un rôle important dans le comportement de reproduction et dans la structuration du groupe familial.

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C'est une espèce considérée comme à stratégie K, c'est-à-dire qui fait peu de petits mais s'en occupe et qui peut littéralement créer et entretenir un environnement favorable pour sa famille ; il est moins prolifique que les autres rongeurs aquatiques de l'hémisphère nord (qui sont plutôt à stratégie r).

En moyenne, C. fiber fait moins de jeunes par portée que C. canadensis. Le succès de reproduction (et donc de colonisation) est aussi dans une certaine mesure « densité-dépendante » ; dans une population trop petite, le taux de mortalité, de grossesse et la taille des portées diminuent, et la maturité sexuelle est retardée,.

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Population

Menaces démographiques

Plusieurs menaces pèsent encore sur l'espèce et elles combinent ou additionnent parfois leurs effets :

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  • Le castor était mangé ; sa chasse et son piégeages l'ont décimé dès le Moyen Âge et l'ont conduit à l' extinction sur presque toute son aire naturelle de répartition avant même le XIXe siècle, surtout en Europe de l'Ouest. Malgré une protection officielle, il peut encore être tiré par erreur (confondu avec un rat musqué ou avec un ragondin, parfois appelé myocastor en référence à son nom latin). Ces deux espèces, introduites en Europe pour leur fourrure qui devait notamment remplacer celle du castor, par exemple pour la production de chapkas, sont invasives et considérées comme « nuisibles ». Leur destruction (par la chasse et par certains pièges) est autorisée et encouragée par diverses autorités car ces animaux dégradent fortement les berges et sont localement déprédateurs de cultures. Or ces deux espèces se sont répandues dans les habitats qui conviennent le mieux au castor ; ce dernier peut alors être victime de pièges ou d'appâts empoisonnés qui leur étaient destinés.
  • De l'Antiquité au XVIIIe siècle, le castor était aussi recherché pour son castoréum (qu'on ne pouvait extraire sans le tuer).
  • Sa fourrure était également très appréciée. On le chassait en hiver, période où le poil est réputé plus dense et saison où le castor est le plus vulnérable ; en 1845, l'encyclopédiste Ph. Le Bas explique que la généralisation du chapeau (de feutre de poils castor) « nécessita l'établissement de grandes fabriques, notamment à Lyon et à Paris, et l'on fit bientôt une telle consommation de castors, que ceux que l'on trouvait en France, et spécialement dans les îles du Rhône, étant détruits, il fallut poursuivre ces animaux industrieux et inoffensifs jusque dans les lacs glacés du Canada ». C'est le sous-poil (plus fin et dense), qui était utilisé pour le feutre ; il présente au microscope des écailles dites « ardillons », qui se chevauchent sur toute la surface des fibres, et qui permettent au feutre d'être exceptionnellement résistant, y compris à la pluie. « Les chapeliers faisaient mijoter ce sous-poil dans un mélange d'acétate de cuivre, de gomme arabique et de mercure, pour après foulage et séchage produire le feutre le plus réputé »,.
  • Dans le même temps, la généralisation du drainage agricole et la recherche conjointe d'une « connectivité hydrologique de surface » visant à accélérer les écoulements, la chenalisation puis la canalisation des cours d'eau et la création de chemins de halage ainsi qu'une urbanisation nécessitant de détruire la ripisylve ont détruit les habitats de vastes populations de castors.
  • Plus tard, les grands barrages hydroélectriques ont été de nouveaux obstacles au déplacement des castors (nécessaire pour l'entretien d'une diversité génétique au sein de l'espèce et pour la colonisation de zones disponibles à la suite de la disparition locale (naturelle ou non) de l'espèce (le castor est vulnérable à des maladies qui peuvent décimer des familles entières lors d'hivers froids ou quand leur nourriture vient à manquer ; c'est un des processus naturels de contrôle des populations)
  • À cette dégradation physique des habitats, il faut ajouter une dégradation chimique liée aux nombreux eutrophisants et polluants introduits dans le milieu aquatique ou contaminant les arbres et écorces à partir de l'air. Au XXe siècle, le castor subit aussi les dangers liés aux poisons largement diffusés dans la nature (notamment ceux utilisés contre les rats et rats musqués).
  • Localement le castor européen est confronté à des castors canadiens échappés de parcs, zoos ou élevages producteurs de fourrure. Ce dernier est moins gros que lui, mais semble souvent plus entreprenant. « La récente découverte de castors nord-américains (Castor canadensis) dans trois pays voisins de la France a soulevé une question importante. Cette espèce peut supplanter C. fiber dans les endroits où les espèces entrent en contact ». Un programme de piégeage et de suivi génétique est en cours dans certains pays pour « éradiquer cette espèce non indigène »,.

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Effectif de la population

Cette dynamique semble répondre à la fois aux caractéristiques générales des dynamiques démographiques d'« espèces-ingénieur » marquées selon les cas par une stabilité démographique ou par des cycles endogènes de diminution/extension de populations, et à certaines caractéristiques écopaysagères.

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Cette dynamique varie beaucoup selon les sous-populations et selon les contextes ; au moins en partie à cause de l'appauvrissement génétique subi par le castor européen (par rapport au castor américain).

Quand des castors sont réintroduits dans un petit bassin versant, la recolonisation se fait plus vite que quand ils sont relâchés dans un grand fleuve ; dans ce dernier cas, on observe souvent un plateau démographique assez stable de 20 à 30 ans avant une progression démographique qui correspond à la colonisation des habitats rivulaires leur convenant. Certains auteurs estiment que cela pourrait être dû à une difficulté plus grande de se rencontrer pour des mâles et femelles qui se seraient répartis dans des espaces plus vastes,,. L'aire colonisée par une population introduite augmente plus vite que l'accroissement démographique, car les jeunes castors peuvent parcourir une grande distance pour s'installer dans les milieux qui leur conviennent le mieux, et ce sont les générations suivantes qui coloniseront les espaces intermédiaires. Son instinct le pousse à ne pas s'éloigner de plus de quelques dizaines de mètres d'un cours d'eau ; ceci ferait que plus une ligne de crête entre deux bassins est marquée, plus il mettra de temps à la franchir.

Dans tous les cas, après une phase de croissance démographique, la population se stabilise. À ce stade, quelques individus cherchent à occuper les milieux moins favorables.

Dans un milieu naturel non contraint par des problèmes de chasse, occupation du sol par l'Homme, pollution, roadkill, etc, cette dynamique est régulée selon un modèle source-puits dépendant de la disponibilité en ressources (territoire, qualité de l'alimentation…) et de la pression de prédation naturelle.

Évaluation du nombre de colonies et du nombre d'individus par colonie : C'est une opération qui reste difficile car pour évaluer la dynamique d'une population sauvage vivant dans les grands pays où existent encore de vastes zones de nature préservée (zones subpolaires de toundra) et dans des régions peu peuplées (Finlande par exemple), il est assez facile de compter les barrages et les huttes (mais les castors n'en font pas toujours), et le castor étant parfois discret durant la journée, il est parfois difficile d'évaluer le taux de huttes réellement occupées ou le total de castors présents dans ces huttes.

  • Ainsi en Finlande, pour disposer de statistiques permettant de réorienter ou moduler les stratégies de conservation du castor, il a été proposé dans les années 1990 de demander à des groupes volontaires de chasseurs d' élan d'un même canton d'évaluer le nombre de castors vivant dans les huttes présentes sur leur zone de chasse à l'élan. Ces résultats ont été comparés avec ceux d'un suivi scientifique fait sur l'ensemble du même canton ; il s'est avéré que de nombreuses huttes ont été construites par des castors hors des zones de chasse à l'élan, voire en pleine zone agricole. Dans ce cas sur 40 % des huttes seulement étaient occupées. 69 % ont été trouvés sur les unités chasse à l'élan mais 31 % de ces huttes étaient hors des zones de chasse (dont 21 % de ce sous-ensemble en forêt et 68 % dans les paysages cultivés et 11 % en zones urbaines). Bien qu'une grande partie de ces chasseurs habitent dans le canton où ils chassent (sur des zones de 9 à 24 km2 environ), ils ont dans ce cas fortement sous-estimé le nombre de huttes occupées (ils en ont trouvé moitié moins que l'équipe de biologistes), ils ont jugé 8 huttes occupées alors qu'elles ne l'étaient pas d'après le recensement fait par les méthodes scientifiques habituelles, et seuls 2 groupes de chasseurs sur 12 ont rapporté avoir cette saison là couvert la totalité de leur territoire de chasse. L'erreur d'appréciation était importante des échelles locales à celle du canton.

La densité des colonies était similaire dans et hors des parcelles de chasse à l'élan. 49 % des 62 colonies actives de ce district étaient situés sur des cours d'eau de moins de 5 m de large, 10 % sur les rivières de plus de 5 m de large et 38 % sur des lacs ou de petits lacs. 3 % étaient établies sur des fossés ou ruisseaux. Une des conclusions de cette étude est que des moyens propres sont nécessaires à l'évaluation des dynamiques de population de castors, et plus encore concernant leur diversité génétique ou le sex-ratio.

  • Le nombre d'individus d'une colonie peut changer au moment du départ des jeunes puis peu après avec les naissances. Les chiffres donnés par les évaluations varient légèrement selon que le comptage est fait au crépuscule ou à l'aube (variations non significatives), et un peu plus entre les mois d'août et de septembre. Tous les membres d'une colonie sont rarement vus ensemble au cours d'une même observation au crépuscule ou à l'aube. Ces ajustements font par exemple passer le nombre moyen d'individus par colonie de 2,4 à 3,8, avec dans ce cas 54 % d'adultes, 26 % et 19 % de jeunes et jeunes de l'année (ces derniers étant les plus sous-estimés par les comptages visuels classiques). Les chiffres de taille des colonies (et de leur composition) doivent donc être considérés avec prudence quand ils ne sont pas obtenus via des méthodes scientifiquement éprouvées pour leur précision et exactitude.
  • Des techniques modernes de radiopistage ou de photographie automatique nocturne permettent de mieux suivre les espèces animales.

Plusieurs guides et chartes ont été écrits pour cadrer la réintroduction de ce Castor,. Selon les « lignes directrices pour les réintroductions » émises par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), « la population d'origine devrait idéalement être étroitement liée génétiquement au stock natif original », mais l'espèce ayant disparu il y a quelques décennies de presque toute son aire naturelle de répartition, et les premières vagues de restauration ayant homogénéisé certaines populations, cela est devenu impossible ou incertain à échelle locale.

La génétique distingue toutefois encore deux populations (occidentale et orientale) où il est possible de « prélever » des individus susceptibles de former ou conforter des noyaux de recolonisation, jugés plus « biologiquement pertinents » possibles, dans les zones respectivement occidentales et orientales de l'Europe, là où les castors ont disparu, ou là où ils sont trop peu nombreux pour assurer une diversité génétique suffisante.

Pour cette raison, et pour des raisons d'éthique environnementale notamment liées au bien-être animal, il a été proposé en Grande-Bretagne, parmi 3 stratégies possibles de choix de souches à réintroduire de « faire une exception éclairée aux directives de l'UICN et de réintroduire un mélange de castors de l'Est et de l'Ouest » (les 2 autres possibilités étant dans ce cas de réintroduire à partir d'un même noyau occidental ou d'un mélange d'individus provenant de plusieurs noyaux occidentaux).

Les conditions de succès des réintroductions ou de confortement de populations et de la reproduction ont été bien étudiées par divers chercheurs ;

Elles varient selon la vigueur de la souche réintroduite (les sujets jeunes et en bonne santé sont recommandés), mais aussi selon le contexte écopaysager. Les critères suivants sont les plus souvent cités :

  • la disponibilité du milieu en saules et un courant pas trop élevé : ex. : à partir du suivi annuel d'une population reconstituée à partir de la réintroduction en 1999, de 18 Castor fiber dans le Jutland du Nord, Sørensen a estimé que dans ce contexte ces 2 facteurs étaient ceux qui affectaient (positivement) le plus le succès de reproduction
  • taille minimale du groupe à réintroduire (l'ONCFS recommande au moins 3 familles (soit jusqu'à 18 individus) ;
  • un lâcher fait de manière que ces familles puissent fonder un territoire distant de quelques km l'un de l'autre (1 colonie par 20 ha de plan d'eau, tous les 2 km au maximum est préconisée pour C canadensis ) ;
  • diversité génétique (éviter notamment la consanguinité ; le choix des provenances et de la génétique des castors à libérer est encore discuté ;
  • une taille et une connectivité écologique suffisante des habitats choisis ;
  • une gestion différenciée des populations de castor (autochtone) d'une part et de rat musqué et ragondin (exotiques envahissants) mais qui vivent en partie dans les mêmes milieux ;
  • une sensibilisation des populations et acteurs locaux ;
  • capacité de prévention/réparation d'éventuels dégâts (dans les régions agricoles et habitées) car les castors apprécient les fruitiers ( pommiers notamment qui représentent 1/4 des dégâts déclarés en 1991 à l'ONCFS devant les pêchers (17,9 %),. Selon l'ONCFS les dégâts signalés concernent plus souvent des petits canaux de drainage ou bordés d'un chemin. En présence d'arbres à protéger « la protection mécanique des arbres et cultures est la plus efficace. Il s'agit de poser des manchons de protection individuelle, des palissades adaptées au Castor voire des clôtures électriques, selon les caractéristiques des cultures à protéger. Dans certains cas, la pose de systèmes empêchant l'accès du Castor à certains ruisseaux, voire le déplacement d'individus, peuvent s'avérer nécessaires ».

Après son retour spontané ou sa réintroduction, ses barrages (il n'en fait pas toujours en zone rocheuse et n'en fait pas en eaux profondes) peuvent à nouveau inonder des surfaces significatives, ce qui diminue le risque d'incendies de forêt et favorise le rechargement des nappes (Cf. loi de Darcy) mais peut parfois perturber les usages de ces zones (ex : si l'on y a entre-temps construit des routes ou mis d'anciennes zones humides en culture). Certaines zones où le castor est revenu, après que des routes ou des voies ferrées y ont été construites, sont surveillées au Canada (dont par avion, avec éventuel « contrôle stratégique des populations ») de manière à prévenir d'éventuelles inondations ou problèmes hydrauliques gênants pour les infrastructures. Le déraillement le 7 avril 1997 d'un train du Canadien Pacifique causé par l'affaissement d'une voie ferrée a été supposé lié à une pression hydrostatique trop importante, induite par l'élévation de la nappe à la suite de la construction d'un nouveau barrage par des castors, mais les experts ont aussi conclu que la voie était construite sur un « remblai de sable meuble » qui a « contribué à l'affaissement de la plate-forme ». « Des centaines de milles de chemins de fer canadiens sont sujets aux affaissements de plate-forme », mais l'implication des castors n'a été mise en cause que dans quelques cas et toujours pour des voies anciennes (un siècle environ ou 80 ans), et mal construites.

Autre exemple : La manière dont les ponceaux ont été conçus et des paramètres géomorphologiques et hydroécologiques locaux (dont la disponibilité en ressources alimentaires) peuvent ou non favoriser l'installation de barrages de castors sur des ponceaux. Des solutions existent ou parfois on préfère détruire ou déplacer le barrage. Ainsi dans un cas de menace pour des routes et ponceaux de terrain militaire (CE SCFT Meaford, dans la région des Grands Lacs) ; l'armée, après une étude d'incidence sur l'environnement, a été autorisée à piéger et déplacer les castors, puis détruire le barrage, avec précaution « de manière à ne pas altérer, perturber ou détruire de façon dommageable l'habitat du poisson ». Il arrive au Canada que l'on démantèle des digues de castors pour des raisons de drainage agricole. Si ceci se fait à proximité d'une réserve naturelle de faune, une étude d'incidence est obligatoire, pour évaluer les risques potentiels sur la santé humaine et sur l'environnement.

Inversement, la disparition brutale d'une famille de castors (maladie, chasse, empoisonnement, piégeage) a dans un cas causé l'affaissement d'une plate-forme ferroviaire (attribué à la baisse d'un étang proche à la suite de la rupture d'un barrage de castors (néanmoins, l'expertise a montré que cette voie avait été construite au XIXe siècle, avant les normes modernes de sécurité, et sur une base fragile de tourbe et de limon glacio-lacustre, qui a été déstabilisée par la baisse de l'eau).

Un simple siphon auto-amorcant permet de contrôler le niveau d'un réservoir d'eau construit par le castor. Ce siphon doit être silencieux car le bruit de l'eau qui coule est l'un des deux stimuli qui déclenchent l'acte instinctif de colmater une brèche dans le barrage. L'entrée du siphon doit aussi être protégée ou éloignée vers le centre de la retenue d'eau, car s'il détecte un important courant de fuite, le castor en rebouchera l'entrée avec des branchages et de la terre. Le tuyau peut être rigide ou souple et doit être adapté au débit.

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Niche écologique

Le castor présente des caractères uniques dans le monde animal (si l'on en excepte l'homme) : il est à la fois « ingénieur hydraulicien », « constructeur » (de digues, huttes et terriers) et « ingénieur forestier » ; il est la seule espèce capable d'édifier des barrages, créer d'importantes réserves d'eau et de couper des arbres plus gros que lui (l'éléphant abat des arbres mais ne les coupe pas), tout en permettant à la souche de produire des rejets (taillis). De nombreux indices récemment collectés dans le monde (dont en France par Alexandra Liarsou,) semblent faire de lui un « facteur de forçage des hydrosystèmes du Tardiglaciaire et de l'Holocène », de même que pour la constitution de vastes tourbières. Sans lui, la fluctuation des débits de cours d'eau et de certaines zones humides et lacs aurait sans doute été exacerbée, avec plus de sécheresses et d'incendies de forêt et moins d'espèces différentes dans le paysage ; ceci vaut a priori pour les interglaciaires antérieurs.

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Les études archéopaléontologiques doivent se poursuivre, mais des preuves, nombreuses, d'une capacité à rapidement, fortement et durablement transformer et enrichir son milieu de vie sont fournies par:

  • des observations contemporaines faites in situ là où il n'a pas disparu, là où il recolonise spontanément des milieux ou là où il a été réintroduit ; elles montrent un effet marqué sur la biodiversité animale et végétale qui augmente dans les zones humides qu'il crée et qu'il entretient (là où il fait des barrages ou ouvre la ripisylve au soleil, ).
  • des études archéozoologiques ; elles commencent aussi à préciser la cohabitation homme-castor de la Préhistoire à la période médiévale. Des analyses d'occurrences archéozoologiques ont également précisé sa biogéographie ancienne et son utilisation dans les « établissements humains » (synthétisée par Alexandra Liarsou, 2005 ; Liarsou, 2012 : 591-642). ;
  • diverses études d' écologie rétrospective et d' histoire environnementale ; notamment en Grande-Bretagne et en Scandinavie, elles ont par exemple montré qu'on peut retrouver des vestiges fossiles d'endiguement réalisés par le rongeur (Ukkonen 2001 : 19 ; Aalto et al., 1989 : 3-34 ; Aaris-Sorensen, 2009 : 12) ;
  • l'étude des « processus de turbification induits » par le castor et son « travail » (Kraus et Wells, 1999 : 251-268 ; Wells et al., 2000 : 503-508) ;
  • des indices et hypothèses proposés par divers auteurs (Rowley-Conwy, 1982 ; Coles et Orme, 1983 : 95-102 ; Zvelebil et Rowley-Conwy, 1985 : 104-128 ; Coles, 1992 : 93-99 ; Coles, 2006) sur son impact environnemental à la Préhistoire ou plus tôt encore ;
  • des méthodes permettant de mieux repérer les effets anciens du castor sur les dépôts alluvionnaires, via des « marqueurs permettant de discriminer le rôle du castor des autres phénomènes, anthropiques et climatiques, qui ont influé sur les faciès d'écoulement et la morphologie des rivières quaternaires (notamment les cycles d'asséchement et de mise en eau des terrains ; la qualité et la quantité des dépôts sédimentaires caractérisant les occupations de castors ». Pour limiter les risques d'interprétation archéologique erronée son travail de bioturbation et ses écofacts devraient être mieux pris en compte pour l'étude des sites archéologiques correspondant à d'anciennes zones humides. Son « influence post-sédimentaire » a par exemple été bien documentée sur des sites du Paléolithique supérieur en plaine inondable d'Allemagne du Nord, marqués par un vaste système de terriers et des activités qui ont modifié la sédimentologie locale à grande échelle.

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Références

1. Castor fiber article sur Wikipédia - https://fr.wikipedia.org/wiki/Castor_fiber
2. Castor fiber sur le site de la Liste Rouge de l'UICN - http://www.iucnredlist.org/details/4007/0

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