Rivière

Mékong

3 espèces

Le Mékong est un fleuve d’Asie du Sud-Est, le dixième fleuve du monde et le quatrième d’Asie par son débit, celui-ci atteignant en moyenne 284 km3 d’eau par an. Les chiffres concernant sa longueur varient de 4 350 à 4 909 km, et son bassin versant draine 810 000 km2.

Prenant sa source dans le Qinghai (sur les hauteurs de l’Himalaya), dans le Xian de Zadoi, sur le mont Guozongmucha (果宗木查), le Mékong irrigue successivement la Chine (dans la province du Yunnan), borde le Laos à la frontière de la Birmanie puis de la Thaïlande avant de couler au Laos et de revenir à sa frontière, puis traverse le Cambodge où se forment les premiers bras de son delta, qui se prolonge dans le sud du Viêt Nam où il est appelé traditionnellement le « fleuve des neuf dragons » (en vietnamien : Sông Cửu Long).

Environ 70 millions d’habitants vivent directement dans son bassin versant. Il est notamment utilisé pour l’irrigation, comme réceptacle de systèmes de drainage et d’eaux usées, pour la pêche et la pisciculture, la production hydroélectrique (grâce aux barrages comme ceux au Yunnan), le transport et la fourniture d’eau pour l’industrie et les particuliers. Il est également connu pour ses habitations et marchés flottants.

Une commission internationale — le Comité du Mékong (Mekong River Commission) créée en avril 1995 — est consacrée à une gestion transrégionale des conflits et problèmes liés au fleuve, dans une perspective affichée de développement durable signé par la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Viêt Nam. La Birmanie et la Chine n'ont de leur propre gré qu'un statut d'observateurs.

Géographie

La source du fleuve, et donc la mesure de sa longueur effective, est inconnue en raison de l’existence de plusieurs affluents dans un environnement d’accès difficile (terrain très accidenté). Les estimations vont de 4 350 à 4 909 km.

Selon le relevé du China Science Exploration Association, la source est Lasagongma, située à une altitude de 5 224 mètres. Elle est sur le mont Guozongmucha dans la province de Qinghai et forme le Zayaqu, reconnu par le Chinese Academy of Sciences comme la source du Mékong. Une expédition plus ancienne menée par Michel Peissel avait identifié le Zanaqu, plus à l’ouest au col Rupsa-la (à 4 975 m), comme source du Mékong.

Près de la moitié de la longueur totale coule en Chine, où ce tronçon du fleuve est appelé « fleuve turbulent » en raison de ses gorges et précipices. Il quitte le pays à une altitude de seulement 500 m.

Le fleuve forme ensuite la frontière entre la Birmanie et le Laos sur 200 km, à la fin desquels il rejoint son affluent le Ruak au Triangle d'or. Cet endroit marque aussi la séparation des haut et bas Mékongs.

Le fleuve sépare alors le Laos de la Thaïlande avant d’entamer une section coulant uniquement au Laos qui est caractérisée par des gorges, des rapides et une profondeur d’à peine un demi-mètre pendant la saison sèche. Il s’élargit au sud de Luang Prabang, où il a inondé la région jusqu’à 100 mètres de profondeur et sur un rayon de 4 km ; son cours est très variable. Le célèbre poisson-chat géant du Mékong était traditionnellement pêché dans cette région une fois par an, suivant des rites établis par la famille royale.

Le fleuve redevient la frontière entre le Laos et la Thaïlande dans la section qui passe près de la capitale laotienne Vientiane, et repasse ensuite seulement au Laos, où il forme la région de Si Phan Don (« quatre mille îles ») avant les chutes de Khone près de la frontière avec le Cambodge. À ce niveau vivent des dauphins de l'Irrawaddy (des dauphins d’eau douce) en danger d’extinction. Les chutes de Khone ne sont pratiquement pas navigables.

Au Cambodge, le fleuve passe par les rapides de Sambor au-dessus de Kracheh, les dernières chutes à interdire la navigation. Juste avant Phnom Penh, la capitale du Cambodge, se situe la confluence avec le Tonle Sap, son affluent le plus important dans ce pays. Après la capitale, le fleuve se divise en deux, le Bassac et le Mékong lui-même ; tous deux finissent dans le delta du Mékong.

Au Viêt Nam, le fleuve se divise en deux branches principales qui s’appellent le Tiền Giang (« fleuve à l’avant ») et le Hậu Giang (« fleuve à l’arrière ») ; celles-ci entrent en mer de Chine méridionale par neuf estuaires, expliquant ainsi le nom vietnamien pour le fleuve, Sông Cửu Long (« fleuve des neuf dragons »).

Environ 90 millions de personnes dépendent du fleuve. La région dans laquelle ils vivent, la sous-région du Grand Mékong, inclut le Yunnan en Chine, la Birmanie, le Laos, la Thaïlande, le Cambodge et le Viêt Nam. La principale production de la région est la culture du riz exploitée sur une surface d'environ 140 000 km2. Un grand nombre de variétés de riz y est cultivé. Sur environ les 100 000 cultivars de la banque génétique du riz de l'institut international de recherche sur le riz approximativement 40 000 viennent de la région.

Réseau hydrographique

En arrivant au Viêt Nam, le Mékong prend le nom de Cuu Long (Cửu Long, neuf dragons), censé représenter les neuf branches qui se jettent en mer de Chine méridionale.

En pratique, au début du XXIe siècle, le delta comporte quatre grands cours d’eau :

  • le Bassac (Hậu Giang, ou deuxième fleuve), qui porte une part importante du débit du Mékong, et qui passe à Can Tho (Cần Thơ) ;
  • le Tien Giang (Tiền Giang, ou premier fleuve), qui prend plusieurs noms le long de son cours, dont Song Ho (Sông Hổ, le « fleuve tigre »), dans la région de Dong Thap (Đồng Tháp), et qui se sépare lui aussi en plusieurs branches, d’Ouest en Est :
    • le fleuve Co Chien (Cổ Chiên), à la ville de Vinh Long (Vĩnh Long),
    • le fleuve Ham Luong (Hàm Luông), qui traverse la province de Bến Tre (Bến Tre),
    • le fleuve My Tho (Sông Mỹ Tho).

Problèmes environnementaux

La région du Mékong est de plus en plus menacé par la pollution, la déforestation et la construction de barrages.

De nos jours, le Mékong est un fleuve encore pollué par l'usage intensif d'herbicides dont le puissant Agent Orange-dioxine par l'armée américaine d'août 1961 à 1971 (1972) : près de 80 millions de litres d'herbicides ont été déversés sur la jungle vietnamienne et laotienne ; plus de 2 500 000 hectares contaminés (25 000 km2) ; destruction de plus d'un million d'hectares de forêt tropicale (10 000 km2) ; disparition d'une faune et flore abondantes, les arbres hopea odorata, sindora siamensis... faisant place sur les sols appauvris à des bambous et des herbes hautes surnommées "les herbes américaines" ; et aussi apparition de graves problèmes de santé, en particulier pour les vétérans de la guerre et pour les populations vietnamienne, cambodgienne et laotienne (malformations à la naissance, hypertrophie, rachitisme, cancer des poumons et de la prostate, maladies de la peau, du cerveau et des systèmes nerveux, respiratoire et circulatoire, cécité, diverses anomalies à la naissance... ). En 2014, l'ancienne journaliste et militante franco-vietnamienne Tran To Nga intente un procès contre les firmes ayant produit ou commercialisé l'Agent Orange pour que ce crime ne soit pas impuni ; et en 2018 une équipe scientifique pluridisciplinaire commence une enquête sur les conséquences de l'épandage intensif de l'Agent Orange ainsi que sur les effets des pesticides utilisés actuellement dans l'agriculture de la région.

Aujourd'hui s'y ajoute de plus la pollution de l'industrie et la pollution des activités humaines ordinaires.

Les deux sujets actuellement les plus controversés sont ceux de la construction de barrages pour produire de l'électricité et la destruction de sauts. Plusieurs barrages ont été construits sur des affluents du fleuve, notamment ceux de Nam Theun 2 au Laos et de Pak Mun en Thaïlande, ou sur le fleuve lui-même (tel le barrage de Xayaburi au Laos, ainsi que plusieurs barrages chinois sur le Mékong). Déjà en 1976, le réalisateur Euthana Mukdasanit avait dénoncé dans son docu-fiction Tongpan les conséquences sociales dramatiques de la construction du barrage de Pa Mong Dam en Thaïlande mais son film avait été immédiatement interdit et banni par la junte militaire car soi-disant "communiste". La construction de nouveaux barrages est une stratégie critiquée de nos jours au niveau du coût ainsi qu’en raison des dommages infligés à l’environnement et aux villageois.

Le Cambodge, pays dévasté par la guerre, est complètement dépendant du fleuve pour nourrir ses habitants et mener son économie. Les inondations annuelles fournissent de l’eau, si précieuse dans un pays sec, et remplissent le lac Tonle Sap. Toutes les villes principales du pays sont sujettes aux inondations. La Commission du Mékong a accusé la Chine de ne pas se soucier de ses voisins en aval avec ses projets de barrages sur le fleuve. Depuis la construction du premier barrage chinois, beaucoup d’espèces sont en danger d’extinction, par exemple le Dauphin de l'Irrawaddy Orcaella brevirostris, le niveau du fleuve a baissé, les poissons pêchés sont plus petits et moins nombreux, le port de Chiang Rai fonctionne à un quart de son activité normale, et la navigation entre Chiang Rai et Luang Prabang dure deux jours faute de niveau d’eau suffisant.

Les nouveaux barrages à l’étude auront un impact encore plus négatif sur le fleuve : tous les pays en aval souffriront d’une pollution accrue (due au développement et à la faible mise en application des lois concernant la pollution en Chine). Les pesticides et l’industrie lourde vont polluer les réserves de vivres et encourageront les efflorescences algales des organophosphates de l’agriculture, menant à des invasions de jacinthe d'eau. Ils vont aussi bloquer les migrations d’espèces de poissons.

D’autres problèmes surgissent : des courants trop forts à certains endroits pendant que la Chine détruit des rochers, des bancs de sable et des gorges et ralentit l’eau en la contenant entre des barrages pour inonder section après section. Les habitants de la région vont être déplacés. Le Cambodge est le pays le plus à risque, dépendant de courants et d’inondations bien précis ; on y craint des famines, comme celle qui aurait décimé la civilisation d’Angkor il y a 700 ans. Toutes les grandes villes du Laos sont sur le fleuve, ainsi que la plus grande ville du Viêt Nam, Hô Chi Minh-Ville, qui sera affectée par les courants insuffisants et la pollution. Même la Thaïlande n'est plus à l'abri, puisqu'en 2010, le Mékong ayant atteint son niveau le plus bas depuis 20 ans, la population commence à connaître des pénuries d'eau. En outre, les sols sont plus pauvres faute de sédiments et de boues. Surtout, il y a une baisse de la quantité d’eau douce disponible, ce qui entraîne de graves difficultés dans l’économie familiale et une spirale d’appauvrissement.

Par ailleurs l’augmentation globale de la température apporte de mauvaises influences au delta du Mékong. La culture du riz est très touchée et la baisse des rendements affecte l’économie du Vietnam. Il y a un risque de disparition d’une trentaine d’espèces de riz et un développement des pathologies. En effet, on constate des ravages de grande ampleur à cause des insectes ou des champignons. En outre, l’apparition d’épisodes climatiques extrêmes comme les sécheresses ou les inondations pousse à exercer des actions concrètes ; le stockage de l’eau douce et des grains, l’amélioration des prévisions météorologiques, etc.. Sur le plan sanitaire, la dengue se répand.

Le delta du Mékong souffre aussi de la pression démographique et des pratiques d'agriculture intensive. Enfin, une exploitation mal maîtrisée de l'extraction du sable dans le delta a pour conséquence une érosion importante des rives à proximité.

Faune et flore

On estime que le bassin du Mékong abrite 20 000 espèces de plantes, 1 200 espèces d'oiseaux (une centaine endémiques), près de 520 espèces de reptiles (deux cents endémiques), autour de 180 espèces d'amphibiens (cent cinquante endémiques), 430 espèces de mammifères (soixante-dix endémiques) et 1 300 espèces de poissons. Depuis 1997, des expéditions scientifiques ont permis de découvrir un grand nombre de nouvelles espèces. Ainsi, la première édition du rapport Greater Mekong édité par l'ONG WWF nous informe que, entre 1997 et 2007, les scientifiques ont découvert 1068 espèces animales et végétales en 10 ans : 519 plantes, 4 oiseaux, 46 lézards et 22 serpents, 4 tortues, 91 amphibiens, 15 mammifères, 279 poissons et 88 araignées. Parmi ces découvertes, on trouve l'araignée heteropoda maxima, peut être la plus grande des araignées de la planète ; et le kha-nyou, un petit rongeur d'un groupe d'espèces que l'on croyait éteint depuis près de dix millions d'années. Et depuis, ce sont plus de 1700 autres espèces qui ont été nouvellement décrites. En 2009, ce sont 145 nouvelles espèces qui ont été répertoriées dont 96 plantes parmi lesquelles la plante carnivore géante nepenthes bokorensis, 26 espèces de poissons parmi lesquelles le danionella dracula, 10 espèces de reptiles (les geckos nocturnes cyrtodactylus cattienensis et cyrtodactylus erythrops, les geckos dixonius aaronbaueri et gekko russelltraini ainsi que les serpents calamaria abramovi, calamaria gialaiensis et calamaria sangi, colubroelaps nguyenvansangi, pareas nigriceps et protobothrops trungkhanhensis), 2 espèces d'oiseaux (bulbul hualon et pouillot calciatile), 6 espèces d'amphibiens (hylarana eschatia, leptolalax applebyi, odorrana geminata, quasipaa acanthophora, rhacophorus spelaeus et theloderma lateriticum) et 5 espèces de mammifères (trois espèces de musaraignes à dents blanches crocidura et deux espèces de chauves-souris murina eleryi et rhinolophus thailandensis). Pour la seule année 2010, pas moins de 208 espèces ont été découvertes, dont la plupart sont endémiques. Selon ce rapport, le travail de terrain a permis de découvrir, entre autres, un nouveau singe de la famille des rhinopithèques, 28 reptiles, dont un lézard exclusivement femelle capable de s'auto-reproduire et un gecko aux couleurs psychédéliques, un minuscule oiseau forestier vert et jaune, 7 grenouilles ainsi que 25 poissons. En 2011, 126 nouvelles espèces ont encore été découvertes et ainsi de suite.

Bien que cette région soit l'une des plus riches du monde en biodiversité, elle n'en est pas moins menacée, notamment à cause de la disparition des habitats des espèces. Des projets d'infrastructures de grande envergure, comme le barrage de Sayaboury dans le nord du Laos, le barrage Pak Mun en Thaïlande, le barrage de Xayaburi et tous les autres barrages font peser de lourdes menaces sur les écosystèmes. Néanmoins, parfois certains de ces projets sont annulés ou suspendus : le Cambodge a par exemple suspendu jusqu'à au moins 2030 son projet d'immense barrage électrique de Sambor...

Mammifères aquatiques

La population de dauphins d'eau douce de l'Irrawaddy du fleuve est en danger d'extinction : en 2017, il a complètement disparu du Laos et on n'en compte plus que 92 au Cambodge dans le Mékong.

Oiseaux

Parmi les centaines d'espèces d'oiseaux que l'on peut observer au bord du Mékong, on peut citer : la glaréole lactée (glareola lactea) ; le canard à bec tacheté (anas poecilorhyncha) ; le chevalier sylvain (tringa glaerola) ; le martin-pêcheur d'Europe (alcedo atthis) et le martin-chasseur de Smyrne (halcyon smyrnensis) ; le jacana à longue queue (hydrophasianus chirurgus) ; le vanneau pie (vannelus duvaucelli) et le vanneau indien (vannelus indicus) ainsi que le petit gravelot (charadrius dubius) ; l'échasse blanche (himantopus himantopus) ; le héron bubulcus coromandus ; l'énicure à dos noir (enicurus immaculatus) ; l'hirondelle paludicole (riparia paludicota) ; le crabier chinois (ardeola bacchus) ; le busard d'Orient (circus spilonotus) ; le dendrocygne siffleur (dendrocygnus javanica) ; la bergeronnette grise (motacilla alba), la bergeronnette du Mékong (motacilla somvaesnae) et la bergeronnette des ruisseaux (motacilla cinerea) etc.

Flore

Les bords du Mékong présente une très grande biodiversité de plantes bien que la superficie forestière ait chuté de plus de 55 % dans les années 1970 à 34 % aujourd'hui (source WWF, 2021).

Ces plantes sont souvent utilisées en cuisine, en médecine ou en alimentation pour le bétail.

Il y a par exemple :

  • des arbres de 10 m de haut et plus comme le moringa (thaï : ต้น มะรุม), le ricin commun (ละหุ่ง ou หุ่งเทศน้า), le tamarin d'Inde (มะขามเทศ), le prunier mombin (มะกอก ou มะกอกป่า), le jamelonier (ต้น หว้า น้ำ) ;
  • des arbustes et apparentés comme l' acanthus ebracteatus ( ต้น เหงือกปลาหมอ), le sambong (หนาด ou หนาดใหญ่ ou หนาดหลวง), le mimosa pigra (ไมยราบยักษ์), le bananier musa balbisiana (ต้น กล้วย ตานี) du groupe ABB (ต้น กล้วย ติบ), le dattier du Mékong ( ปาล์มสิบสองปันนา) ;
  • des plantes herbacées comme le liseron d'eau ou patate aquatique (ผักบุ้ง) et la jacinthe d'eau (ผักตบชวา, la sensitive ou mimosa pudique (ไมยราบ), la passiflore fétide (กะทกรก), la cleome viscosa (ผักเสี้ยนผี), le crinum lys (พลับพลึง), le souchet rond (หญ้า แห้วหมู), la canne à sucre fourragère (หญ้า เลา) et le vétiver (หญ้า แฝก ou หญ้า แฝก น้ำ) etc.
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Le Mékong est un fleuve d’Asie du Sud-Est, le dixième fleuve du monde et le quatrième d’Asie par son débit, celui-ci atteignant en moyenne 284 km3 d’eau par an. Les chiffres concernant sa longueur varient de 4 350 à 4 909 km, et son bassin versant draine 810 000 km2.

Prenant sa source dans le Qinghai (sur les hauteurs de l’Himalaya), dans le Xian de Zadoi, sur le mont Guozongmucha (果宗木查), le Mékong irrigue successivement la Chine (dans la province du Yunnan), borde le Laos à la frontière de la Birmanie puis de la Thaïlande avant de couler au Laos et de revenir à sa frontière, puis traverse le Cambodge où se forment les premiers bras de son delta, qui se prolonge dans le sud du Viêt Nam où il est appelé traditionnellement le « fleuve des neuf dragons » (en vietnamien : Sông Cửu Long).

Environ 70 millions d’habitants vivent directement dans son bassin versant. Il est notamment utilisé pour l’irrigation, comme réceptacle de systèmes de drainage et d’eaux usées, pour la pêche et la pisciculture, la production hydroélectrique (grâce aux barrages comme ceux au Yunnan), le transport et la fourniture d’eau pour l’industrie et les particuliers. Il est également connu pour ses habitations et marchés flottants.

Une commission internationale — le Comité du Mékong (Mekong River Commission) créée en avril 1995 — est consacrée à une gestion transrégionale des conflits et problèmes liés au fleuve, dans une perspective affichée de développement durable signé par la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Viêt Nam. La Birmanie et la Chine n'ont de leur propre gré qu'un statut d'observateurs.

Géographie

La source du fleuve, et donc la mesure de sa longueur effective, est inconnue en raison de l’existence de plusieurs affluents dans un environnement d’accès difficile (terrain très accidenté). Les estimations vont de 4 350 à 4 909 km.

Selon le relevé du China Science Exploration Association, la source est Lasagongma, située à une altitude de 5 224 mètres. Elle est sur le mont Guozongmucha dans la province de Qinghai et forme le Zayaqu, reconnu par le Chinese Academy of Sciences comme la source du Mékong. Une expédition plus ancienne menée par Michel Peissel avait identifié le Zanaqu, plus à l’ouest au col Rupsa-la (à 4 975 m), comme source du Mékong.

Près de la moitié de la longueur totale coule en Chine, où ce tronçon du fleuve est appelé « fleuve turbulent » en raison de ses gorges et précipices. Il quitte le pays à une altitude de seulement 500 m.

Le fleuve forme ensuite la frontière entre la Birmanie et le Laos sur 200 km, à la fin desquels il rejoint son affluent le Ruak au Triangle d'or. Cet endroit marque aussi la séparation des haut et bas Mékongs.

Le fleuve sépare alors le Laos de la Thaïlande avant d’entamer une section coulant uniquement au Laos qui est caractérisée par des gorges, des rapides et une profondeur d’à peine un demi-mètre pendant la saison sèche. Il s’élargit au sud de Luang Prabang, où il a inondé la région jusqu’à 100 mètres de profondeur et sur un rayon de 4 km ; son cours est très variable. Le célèbre poisson-chat géant du Mékong était traditionnellement pêché dans cette région une fois par an, suivant des rites établis par la famille royale.

Le fleuve redevient la frontière entre le Laos et la Thaïlande dans la section qui passe près de la capitale laotienne Vientiane, et repasse ensuite seulement au Laos, où il forme la région de Si Phan Don (« quatre mille îles ») avant les chutes de Khone près de la frontière avec le Cambodge. À ce niveau vivent des dauphins de l'Irrawaddy (des dauphins d’eau douce) en danger d’extinction. Les chutes de Khone ne sont pratiquement pas navigables.

Au Cambodge, le fleuve passe par les rapides de Sambor au-dessus de Kracheh, les dernières chutes à interdire la navigation. Juste avant Phnom Penh, la capitale du Cambodge, se situe la confluence avec le Tonle Sap, son affluent le plus important dans ce pays. Après la capitale, le fleuve se divise en deux, le Bassac et le Mékong lui-même ; tous deux finissent dans le delta du Mékong.

Au Viêt Nam, le fleuve se divise en deux branches principales qui s’appellent le Tiền Giang (« fleuve à l’avant ») et le Hậu Giang (« fleuve à l’arrière ») ; celles-ci entrent en mer de Chine méridionale par neuf estuaires, expliquant ainsi le nom vietnamien pour le fleuve, Sông Cửu Long (« fleuve des neuf dragons »).

Environ 90 millions de personnes dépendent du fleuve. La région dans laquelle ils vivent, la sous-région du Grand Mékong, inclut le Yunnan en Chine, la Birmanie, le Laos, la Thaïlande, le Cambodge et le Viêt Nam. La principale production de la région est la culture du riz exploitée sur une surface d'environ 140 000 km2. Un grand nombre de variétés de riz y est cultivé. Sur environ les 100 000 cultivars de la banque génétique du riz de l'institut international de recherche sur le riz approximativement 40 000 viennent de la région.

Réseau hydrographique

En arrivant au Viêt Nam, le Mékong prend le nom de Cuu Long (Cửu Long, neuf dragons), censé représenter les neuf branches qui se jettent en mer de Chine méridionale.

En pratique, au début du XXIe siècle, le delta comporte quatre grands cours d’eau :

  • le Bassac (Hậu Giang, ou deuxième fleuve), qui porte une part importante du débit du Mékong, et qui passe à Can Tho (Cần Thơ) ;
  • le Tien Giang (Tiền Giang, ou premier fleuve), qui prend plusieurs noms le long de son cours, dont Song Ho (Sông Hổ, le « fleuve tigre »), dans la région de Dong Thap (Đồng Tháp), et qui se sépare lui aussi en plusieurs branches, d’Ouest en Est :
    • le fleuve Co Chien (Cổ Chiên), à la ville de Vinh Long (Vĩnh Long),
    • le fleuve Ham Luong (Hàm Luông), qui traverse la province de Bến Tre (Bến Tre),
    • le fleuve My Tho (Sông Mỹ Tho).

Problèmes environnementaux

La région du Mékong est de plus en plus menacé par la pollution, la déforestation et la construction de barrages.

De nos jours, le Mékong est un fleuve encore pollué par l'usage intensif d'herbicides dont le puissant Agent Orange-dioxine par l'armée américaine d'août 1961 à 1971 (1972) : près de 80 millions de litres d'herbicides ont été déversés sur la jungle vietnamienne et laotienne ; plus de 2 500 000 hectares contaminés (25 000 km2) ; destruction de plus d'un million d'hectares de forêt tropicale (10 000 km2) ; disparition d'une faune et flore abondantes, les arbres hopea odorata, sindora siamensis... faisant place sur les sols appauvris à des bambous et des herbes hautes surnommées "les herbes américaines" ; et aussi apparition de graves problèmes de santé, en particulier pour les vétérans de la guerre et pour les populations vietnamienne, cambodgienne et laotienne (malformations à la naissance, hypertrophie, rachitisme, cancer des poumons et de la prostate, maladies de la peau, du cerveau et des systèmes nerveux, respiratoire et circulatoire, cécité, diverses anomalies à la naissance... ). En 2014, l'ancienne journaliste et militante franco-vietnamienne Tran To Nga intente un procès contre les firmes ayant produit ou commercialisé l'Agent Orange pour que ce crime ne soit pas impuni ; et en 2018 une équipe scientifique pluridisciplinaire commence une enquête sur les conséquences de l'épandage intensif de l'Agent Orange ainsi que sur les effets des pesticides utilisés actuellement dans l'agriculture de la région.

Aujourd'hui s'y ajoute de plus la pollution de l'industrie et la pollution des activités humaines ordinaires.

Les deux sujets actuellement les plus controversés sont ceux de la construction de barrages pour produire de l'électricité et la destruction de sauts. Plusieurs barrages ont été construits sur des affluents du fleuve, notamment ceux de Nam Theun 2 au Laos et de Pak Mun en Thaïlande, ou sur le fleuve lui-même (tel le barrage de Xayaburi au Laos, ainsi que plusieurs barrages chinois sur le Mékong). Déjà en 1976, le réalisateur Euthana Mukdasanit avait dénoncé dans son docu-fiction Tongpan les conséquences sociales dramatiques de la construction du barrage de Pa Mong Dam en Thaïlande mais son film avait été immédiatement interdit et banni par la junte militaire car soi-disant "communiste". La construction de nouveaux barrages est une stratégie critiquée de nos jours au niveau du coût ainsi qu’en raison des dommages infligés à l’environnement et aux villageois.

Le Cambodge, pays dévasté par la guerre, est complètement dépendant du fleuve pour nourrir ses habitants et mener son économie. Les inondations annuelles fournissent de l’eau, si précieuse dans un pays sec, et remplissent le lac Tonle Sap. Toutes les villes principales du pays sont sujettes aux inondations. La Commission du Mékong a accusé la Chine de ne pas se soucier de ses voisins en aval avec ses projets de barrages sur le fleuve. Depuis la construction du premier barrage chinois, beaucoup d’espèces sont en danger d’extinction, par exemple le Dauphin de l'Irrawaddy Orcaella brevirostris, le niveau du fleuve a baissé, les poissons pêchés sont plus petits et moins nombreux, le port de Chiang Rai fonctionne à un quart de son activité normale, et la navigation entre Chiang Rai et Luang Prabang dure deux jours faute de niveau d’eau suffisant.

Les nouveaux barrages à l’étude auront un impact encore plus négatif sur le fleuve : tous les pays en aval souffriront d’une pollution accrue (due au développement et à la faible mise en application des lois concernant la pollution en Chine). Les pesticides et l’industrie lourde vont polluer les réserves de vivres et encourageront les efflorescences algales des organophosphates de l’agriculture, menant à des invasions de jacinthe d'eau. Ils vont aussi bloquer les migrations d’espèces de poissons.

D’autres problèmes surgissent : des courants trop forts à certains endroits pendant que la Chine détruit des rochers, des bancs de sable et des gorges et ralentit l’eau en la contenant entre des barrages pour inonder section après section. Les habitants de la région vont être déplacés. Le Cambodge est le pays le plus à risque, dépendant de courants et d’inondations bien précis ; on y craint des famines, comme celle qui aurait décimé la civilisation d’Angkor il y a 700 ans. Toutes les grandes villes du Laos sont sur le fleuve, ainsi que la plus grande ville du Viêt Nam, Hô Chi Minh-Ville, qui sera affectée par les courants insuffisants et la pollution. Même la Thaïlande n'est plus à l'abri, puisqu'en 2010, le Mékong ayant atteint son niveau le plus bas depuis 20 ans, la population commence à connaître des pénuries d'eau. En outre, les sols sont plus pauvres faute de sédiments et de boues. Surtout, il y a une baisse de la quantité d’eau douce disponible, ce qui entraîne de graves difficultés dans l’économie familiale et une spirale d’appauvrissement.

Par ailleurs l’augmentation globale de la température apporte de mauvaises influences au delta du Mékong. La culture du riz est très touchée et la baisse des rendements affecte l’économie du Vietnam. Il y a un risque de disparition d’une trentaine d’espèces de riz et un développement des pathologies. En effet, on constate des ravages de grande ampleur à cause des insectes ou des champignons. En outre, l’apparition d’épisodes climatiques extrêmes comme les sécheresses ou les inondations pousse à exercer des actions concrètes ; le stockage de l’eau douce et des grains, l’amélioration des prévisions météorologiques, etc.. Sur le plan sanitaire, la dengue se répand.

Le delta du Mékong souffre aussi de la pression démographique et des pratiques d'agriculture intensive. Enfin, une exploitation mal maîtrisée de l'extraction du sable dans le delta a pour conséquence une érosion importante des rives à proximité.

Faune et flore

On estime que le bassin du Mékong abrite 20 000 espèces de plantes, 1 200 espèces d'oiseaux (une centaine endémiques), près de 520 espèces de reptiles (deux cents endémiques), autour de 180 espèces d'amphibiens (cent cinquante endémiques), 430 espèces de mammifères (soixante-dix endémiques) et 1 300 espèces de poissons. Depuis 1997, des expéditions scientifiques ont permis de découvrir un grand nombre de nouvelles espèces. Ainsi, la première édition du rapport Greater Mekong édité par l'ONG WWF nous informe que, entre 1997 et 2007, les scientifiques ont découvert 1068 espèces animales et végétales en 10 ans : 519 plantes, 4 oiseaux, 46 lézards et 22 serpents, 4 tortues, 91 amphibiens, 15 mammifères, 279 poissons et 88 araignées. Parmi ces découvertes, on trouve l'araignée heteropoda maxima, peut être la plus grande des araignées de la planète ; et le kha-nyou, un petit rongeur d'un groupe d'espèces que l'on croyait éteint depuis près de dix millions d'années. Et depuis, ce sont plus de 1700 autres espèces qui ont été nouvellement décrites. En 2009, ce sont 145 nouvelles espèces qui ont été répertoriées dont 96 plantes parmi lesquelles la plante carnivore géante nepenthes bokorensis, 26 espèces de poissons parmi lesquelles le danionella dracula, 10 espèces de reptiles (les geckos nocturnes cyrtodactylus cattienensis et cyrtodactylus erythrops, les geckos dixonius aaronbaueri et gekko russelltraini ainsi que les serpents calamaria abramovi, calamaria gialaiensis et calamaria sangi, colubroelaps nguyenvansangi, pareas nigriceps et protobothrops trungkhanhensis), 2 espèces d'oiseaux (bulbul hualon et pouillot calciatile), 6 espèces d'amphibiens (hylarana eschatia, leptolalax applebyi, odorrana geminata, quasipaa acanthophora, rhacophorus spelaeus et theloderma lateriticum) et 5 espèces de mammifères (trois espèces de musaraignes à dents blanches crocidura et deux espèces de chauves-souris murina eleryi et rhinolophus thailandensis). Pour la seule année 2010, pas moins de 208 espèces ont été découvertes, dont la plupart sont endémiques. Selon ce rapport, le travail de terrain a permis de découvrir, entre autres, un nouveau singe de la famille des rhinopithèques, 28 reptiles, dont un lézard exclusivement femelle capable de s'auto-reproduire et un gecko aux couleurs psychédéliques, un minuscule oiseau forestier vert et jaune, 7 grenouilles ainsi que 25 poissons. En 2011, 126 nouvelles espèces ont encore été découvertes et ainsi de suite.

Bien que cette région soit l'une des plus riches du monde en biodiversité, elle n'en est pas moins menacée, notamment à cause de la disparition des habitats des espèces. Des projets d'infrastructures de grande envergure, comme le barrage de Sayaboury dans le nord du Laos, le barrage Pak Mun en Thaïlande, le barrage de Xayaburi et tous les autres barrages font peser de lourdes menaces sur les écosystèmes. Néanmoins, parfois certains de ces projets sont annulés ou suspendus : le Cambodge a par exemple suspendu jusqu'à au moins 2030 son projet d'immense barrage électrique de Sambor...

Mammifères aquatiques

La population de dauphins d'eau douce de l'Irrawaddy du fleuve est en danger d'extinction : en 2017, il a complètement disparu du Laos et on n'en compte plus que 92 au Cambodge dans le Mékong.

Oiseaux

Parmi les centaines d'espèces d'oiseaux que l'on peut observer au bord du Mékong, on peut citer : la glaréole lactée (glareola lactea) ; le canard à bec tacheté (anas poecilorhyncha) ; le chevalier sylvain (tringa glaerola) ; le martin-pêcheur d'Europe (alcedo atthis) et le martin-chasseur de Smyrne (halcyon smyrnensis) ; le jacana à longue queue (hydrophasianus chirurgus) ; le vanneau pie (vannelus duvaucelli) et le vanneau indien (vannelus indicus) ainsi que le petit gravelot (charadrius dubius) ; l'échasse blanche (himantopus himantopus) ; le héron bubulcus coromandus ; l'énicure à dos noir (enicurus immaculatus) ; l'hirondelle paludicole (riparia paludicota) ; le crabier chinois (ardeola bacchus) ; le busard d'Orient (circus spilonotus) ; le dendrocygne siffleur (dendrocygnus javanica) ; la bergeronnette grise (motacilla alba), la bergeronnette du Mékong (motacilla somvaesnae) et la bergeronnette des ruisseaux (motacilla cinerea) etc.

Flore

Les bords du Mékong présente une très grande biodiversité de plantes bien que la superficie forestière ait chuté de plus de 55 % dans les années 1970 à 34 % aujourd'hui (source WWF, 2021).

Ces plantes sont souvent utilisées en cuisine, en médecine ou en alimentation pour le bétail.

Il y a par exemple :

  • des arbres de 10 m de haut et plus comme le moringa (thaï : ต้น มะรุม), le ricin commun (ละหุ่ง ou หุ่งเทศน้า), le tamarin d'Inde (มะขามเทศ), le prunier mombin (มะกอก ou มะกอกป่า), le jamelonier (ต้น หว้า น้ำ) ;
  • des arbustes et apparentés comme l' acanthus ebracteatus ( ต้น เหงือกปลาหมอ), le sambong (หนาด ou หนาดใหญ่ ou หนาดหลวง), le mimosa pigra (ไมยราบยักษ์), le bananier musa balbisiana (ต้น กล้วย ตานี) du groupe ABB (ต้น กล้วย ติบ), le dattier du Mékong ( ปาล์มสิบสองปันนา) ;
  • des plantes herbacées comme le liseron d'eau ou patate aquatique (ผักบุ้ง) et la jacinthe d'eau (ผักตบชวา, la sensitive ou mimosa pudique (ไมยราบ), la passiflore fétide (กะทกรก), la cleome viscosa (ผักเสี้ยนผี), le crinum lys (พลับพลึง), le souchet rond (หญ้า แห้วหมู), la canne à sucre fourragère (หญ้า เลา) et le vétiver (หญ้า แฝก ou หญ้า แฝก น้ำ) etc.
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