Margaritifera margaritifera
Royaume
Phylum
Classe
Commande
ESPÈCES
Margaritifera margaritifera
Longueur
18
7
cminch
cm inch 

Mulette perlière

La moule perlière d'eau douce (Margaritifera margaritifera), ou mulette perlière, est une espèce de mollusques lamellibranches des rivières claires d'Europe, de Russie, du Canada et de la façade est des États-Unis, communément classée parmi les moules d'eau douce.

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Dans le cycle de développement de l'espèce, la larve doit — durant quelques mois — parasiter un saumon ou une truite (qui la nourrit et la transporte). Les adultes tolèrent des substrats limoneux ou vaseux mais les juvéniles ont impérativement besoin d'un substrat sableux ou graveleux dans lequel de l'eau propre et oxygénée puisse circuler.

C'est une espèce connue pour sa durée de vie exceptionnelle (plus d'un siècle), mais qui est au bord de l'extinction bien que protégée.

Cette espèce a été exploitée jusqu'au milieu du XXe siècle pour la production des perles de joaillerie, avant la découverte au XVIIIe siècle des huîtres perlières tropicales, souvent plus grosses et surtout plus régulières.

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Origine du nom de l'animal

Cette espèce a aussi dans le passé été nommée :

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  • Unio elongata (Lamarck, 1819)
  • Margaritifera margaritifera durrovensis (Bloomer, 1928)
  • Margaritana durrovensis (Bloomer, 1928)

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Apparence

La coquille (dont la forme évoque celle d'un rein) est longue de 60 à 150 mm, et large de 30 à 60 mm (pour une épaisseur de 25 à 40 mm). Ses valves, épaisses par rapport à celles d'autres moules, sont striées à l'extérieur (= bandes d'accroissement) et nacrée à l'intérieur. La couleur externe fonce avec l'âge, pour devenir noire ou presque noire.

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Quand la moule est ouverte, le côté rond vers le haut, la valve droite a une seule dent cardinale et la valve gauche en a deux.

Environ une moule sur 1000 produirait une perle, souvent de forme irrégulière, généralement produite au bord du manteau.

Pour plus de détails, voir clé d'identification.

  • clé d’identification

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Distribution

Géographie

La moule perlière est réputée ne vivre (en groupes denses ou individus épars) que dans les cours d'eau peu profonds à moyennement profonds (10 cm à 2m) aux eaux pures et plutôt oligotrophes, fraiches en été, riches en oxygène et pauvres en calcaire des massifs de moyenne montagne et des plaines. Ses substrats et micro-habitats préférés sont le gravier fin, les anfractuosités de roches en éboulis et moins souvent les fonds sableux. Ces habitats coïncident en partie avec ceux recherchés par les salmonidés pour la ponte.

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Bien que les moules d'eau douces ne soient pas réputées très mobiles, le modèle de distribution spatiale des moules adultes et plus encore des juvéniles n'est pas aléatoire : les jeunes individus de cette espèce montrent de très nettes préférences (par exemple étudiées dans la rivière Kerry, au nord-ouest de l’Écosse) de profondeur, de vitesse moyenne du courant, de substratum et de taux de végétation aquatique...), en termes de distance à la berge. Les profondeurs optimales mesurée en Écosse seraient de 30 à 40 cm et les courants optimaux de 0,25 à 0,75 mètre par seconde à des niveaux d'eau intermédiaires.

Pour les juvéniles la qualité du substratum est vitalement déterminante ; si les adultes tolèrent des substrats limoneux ou vaseux (pour une durée inconnue), aucune jeune moule n'est trouvée vivante dans un tel habitat. Des rivières où se succèdent des substrats vaseux-limoneux et plus sableux/graveleux pourraient donc abriter des populations d'âges différents. Comme les poissons peuvent remonter les glochidies vers la source, chaque rivière peut théoriquement être (re)colonisée sur une grande partie de son cours, à condition de n'être pas polluée. Ceci expliquerait le fait que les petites rivières à castors où les barrages sont nombreux puissent aussi accueillir ces moules, les jeunes en aval du barrage, et les adultes en aval et/ou en amont où les sédiments s'accumulent. Il a été démontré que les barrages de castors sont aussi très favorables aux jeunes salmonidés.

Des modélisations dont la fonction discriminante est basée sur la qualité du substratum se sont montrées capables en Écosse de prédire la présence/absence de moules, avec un taux de 76 à 92 % de succès.

En 2007, une étude a porté sur la survie/mortalité des très jeunes moules (stade post-parasitaire) dans leur habitat naturel selon de nombreux paramètres physicochimiques dans 26 cours d'eau de sept pays européens. Elle visait notamment à vérifier le caractère bioindicateur de l'espèce pour la qualité du substrat à 5 et 10 cm dans les cours d'eau. L'étude a confirmé l'importance de la qualité du sédiment pour la jeune moule qui a besoin de sable ou de gravier pauvre en nutriments (avec présence de manganèse). Le Potentiel redox présentait une différence marquée entre la surface du sédiment et sa mesure à 5 et 10 cm dans le lit, là où il n'y a pas de recrutement de jeunes moules, alors qu'aucune différence de potentiel Redox n'était détectable sur les sites de bonne qualité riches en jeunes moules perlières. De même pour la conductivité électrique, et, dans une moindre mesure, le pH. En outre, les sections de lits de rivières où le sédiment résistait à la pénétration étaient aussi parmi les plus pauvres en recrutement de moules perlières. Ces données confirment que le colmatage du système de macropores interstitiels nuit à la survie des jeunes moules. Alors que d'autres unioidés supportent ou apprécient des sédiments fins, ce n'est pas le cas de M. margaritifera pour laquelle une bonne circulation d'eau entre la surface et les interstices à 5-10 cm de profondeur est un facteur essentiel et prédictif de bonne qualité d'habitat pour cette espèce, alors que la bonne qualité chimique de l'eau libre est insuffisante, en raison d'une dissociation de l'eau courante et de l'eau interstitielle (qui peut être très polluée et anoxique dans les sites dégradés).

Historiquement, l'espèce semble avoir été présente jusqu'au XIXe siècle dans une grande partie de l'Europe de l'Ouest et de l'Est de l'Amérique du Nord, et plutôt en zone froide et tempérée ce qui semble conforme au fait qu'elle soit associée dans son cycle de développement au saumon atlantique, mais l'espèce est en régression depuis au moins un siècle et en régression accélérée depuis la fin du XXe siècle, au point d'être considérée comme en danger d'extinction par de nombreux spécialistes.

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Margaritifera margaritifera carte des habitats

Zones climatiques

Margaritifera margaritifera carte des habitats
Margaritifera margaritifera
Public Domain Dedication (CC0)

Habitudes et mode de vie

Bauer (1992) a conclu de l'étude de 48 populations de cette espèce à travers l'Europe qu'il existe une variation importante des traits d'histoire de vie selon la latitude (du cercle polaire arctique à l'Espagne), avec un succès de reproduction positivement corrélée à la fois la durée maximale de vie (constatée au nord) et la longueur maximale de la coquille, mais négativement corrélée au taux de croissance, ce qui laisserait penser que les populations du sud sont plus vulnérables en termes de succès de reproduction.

Comportement saisonnier

Régime et nutrition

Habitudes d’accouplement

COMPORTEMENT D’ACCOUPLEMENT

Le cycle de vie de la moule perlière se déroule en 4 étapes de développement : le stade glochidies, une phase parasitaire, un stade juvénile et le stade adulte. Il est associé à celui de la truite fario et à celui du saumon atlantique, car les larves du mollusque sont réputées ne pouvoir se développer qu'à l'abri dans les branchies de ces poissons, et uniquement de ceux-ci.

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Chez les moules d'eau douce, les sexes sont séparés (mais si la densité de population est réduite, les femelles peuvent devenir hermaphrodites et s'autoféconder).

Les quatre stades de développement sont :

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Population

Menaces démographiques

Cet animal à développement lent a une longue durée de vie et, en tant que filtreur se nourrissant à l'intérieur du sédiment les premières années puis légèrement au-dessus du fond, il est susceptible de bioaccumuler de nombreux toxiques (métaux lourds, pesticides...) qui peuvent le tuer ou nuire à ses capacités de développement et de reproduction.

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Selon les données disponibles pour l'Europe de l'ouest, cette espèce a fortement régressé ou disparu, même là où les populations de truites n'ont pas régressé. C'est la pollution qui semble être le premier facteur de régression de l'espèce (selon Bauer (1988), il n'y a pas d'indice ou de preuves que des changements dans la structure de la densité ou de l'âge des populations de poissons hôtes (truite) aient contribué à la baisse des moules). Le facteur ayant le plus d'incidence est la pollution, d'origine agricole notamment : « La mortalité au stade adulte présentait une corrélation positive avec le taux de nitrates dans l'eau ». Les taux de phosphates, de calcium et la DBO5 sont également corrélés avec une diminution de la survie et du développement de moules juvéniles. Comme la fertilité de l'espèce (mesurée par la production de glochidiums) est maintenue même dans les populations clairsemées, et dans les rivières polluées, les populations devraient récupérer si les causes du déclin sont supprimées.

Les effets de la pollution sont probablement aggravés par :

  • la dégradation physique des cours d'eau ;
  • les pratiques de l' agriculture industrielle dans le bassin versant. Outre qu'elles sont source d' eutrophisation et de pollution diffuse et chronique par les pesticides et par les antiparasitaires (encore présents dans les excréments d'animaux d'élevage)..., elles sont aussi source d'augmentation de l' érosion des sols et par suite de la turbidité de l'eau ; le recul des moules perlières d'eau douce a aussi coïncidé avec le recul des prairies permanentes extensivement pâturées ;
  • l'introduction de truites arc-en-ciel (impropres au développement du glochidium ),
  • l'introduction de moules zébrées et d'autres espèces exotiques ont contribué à la quasi-disparition de cette espèce sur pratiquement toute son aire de répartition ;
  • l'introduction du rat musqué en particulier peut consommer en hiver de grandes quantités de moules d'eau douce.
  • il est possible (mais non démontré) que les perturbateurs endocriniens soient également un facteur de régression de l'espèce, comme cela a été montré pour d'autres mollusques.

Une étude (1995), qui a utilisé de jeunes moules élevées en cage dans des rivières pour mesurer l'influence de la température et de 12 variables chimiques de l'eau sur les juvéniles, a conclu que « la croissance et la mortalité dépendent en grande partie de la température de l'eau » et qu'il « existe une relation négative entre la croissance et l'eutrophisation ». Le taux de survie en cage est comparable à la survie dans le milieu naturel (avec une croissance égale ou un peu moins rapide), et il est affecté par la colonisation des cages par des insectes aquatiques et par la quantité de sédiments fins qui s'accumulent dans les cages.

Certaines populations sont en situation d'insularisation écologique, ce qui peut les rendre plus vulnérables.

Il est enfin possible que la génétique des truites, différentes en limite d'aire de répartition de M margaritifera influe sur leur acceptation de la glochidiose, et donc sur le succès de reproduction de certaines populations. La diffusion de truites d'élevages dans de très nombreux cours d'eau pourrait aussi avoir perturbé la relation de forte dépendance entre ce salmonidé et la larve parasitaire de M margaritifera.

Ces menaces ont justifié le statut particulier de cette espèce, qui relève de l'annexe III de la Convention de Berne et son classement par l'UICN en espèce menacée d'extinction.

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Effectif de la population

Depuis la fin du XXe siècle, l'espèce est considérée comme très vulnérable et menacée de disparition en Europe de l'ouest, notamment en raison d'une faible plasticité écologique, due à sa dépendance aux milieux non pollués et à deux espèces de salmonidés dont l'une est en forte régression (saumon atlantique sauvage),. D'autres espèces proches (ex : Margaritifera durrovensis Phillips en Irlande où M. margaritifera est en situation de déclin très préoccupant,) sont aussi considérée comme en situation d'extinction imminente).

Conservation

À la suite du Grenelle de l'Environnement, la France a prévu un plan de restauration national, à décliner régionalement.La directive-cadre sur l'eau devrait contribuer à la restauration de la bonne qualité écologique des cours d'eau et des bassins versants, mais un certain nombre de paramètres critiques dont la turbidité restent préoccupants, voire montrent une dégradation. Le réchauffement climatique, en mettant en été à sec les parties amont de cours d'eau, est également un facteur de risque supplémentaire.

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Un programme de conservation de mulettes perlières est actuellement en cours dans le Massif Armoricain et concerne les 6 principales populations restantes de ce secteur (Bretagne et Basse-Normandie), avec le soutien de l'Union européenne (programme LIFE+). Coordonné par l'association Bretagne Vivante, il se déroule jusqu'en 2016. Dans le cadre de ce programme, les populations de mulette de ces 6 cours d'eau sont étroitement suivies.

Des études en génétique des populations ont permis de démontrer que la population de la rivière Éllez en Finistère montrait une différenciation exceptionnelle mais une très faible variabilité génétique pouvant être expliquée par l’isolement de cette population depuis plusieurs dizaines de millions d’années dans l’ouest de la Bretagne, et depuis un million d’années dans la dépression géographique locale, le Yeun Elez. Des données similaires existent pour le N-W de l'Espagne

Un Plan National d'Action pour la Mulette perlière (version préliminaire 2010-05-30) vient d'être mis en place, et la première station d'élevage inaugurée dans le Finistère.

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Références

1. Margaritifera margaritifera article sur Wikipédia - https://fr.wikipedia.org/wiki/Margaritifera_margaritifera
2. Margaritifera margaritifera sur le site de la Liste Rouge de l'UICN - https://www.iucnredlist.org/species/12799/128686456

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