Grand brochet
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Esox lucius

Esox lucius

Le brochet ou grand brochet (Esox lucius) est une espèce de poissons prédateurs de l'ordre des Esociformes, commune dans les eaux douces et saumâtres de l'hémisphère nord (répartition holarctique).

Origine du nom de l'animal

Le mot brochet est issu du français broche car le museau pointu et le corps allongé de cet animal rappellent la forme de l'ustensile de cuisine.

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Le brochet est affublé de nombreux surnoms : broc, bec, bec-de-canard, bec de canne, gros bec, béquet, brocheton, brochette, brouché, buché, filaton, flute, goulu, grand-bec, grand-gousier, lanceron, lançon, luceau, pognan, pogneau, poignard, sifflet, gobe poisson, fusil, requin de rivière ou d'eau douce.

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Apparence

Le brochet est un poisson fusiforme, dont les flancs de couleur verdâtre ou jaunâtre vers le dos deviennent blancs vers le ventre. Les nageoires sont de couleur rouge-orange et portent des rayures sombres.

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Sa taille à l'âge adulte varie de 30 à 110 cm et son poids entre 2 et 10 kg. Cependant des individus de plus de 130 cm et de plus de 30 kg existent mais sont moins fréquents (ce sont généralement des femelles). L'actuel record du plus gros brochet homologué par la Confédération internationale de la pêche sportive est un spécimen de 147 cm (58 cm de tour de ventre) pour 31 kg, capturé en 1983 en Allemagne, surnommé Hecht (brochet en allemand). Le plus grand brochet jamais mesuré et confirmé (152 cm de long, 60 cm de tour de ventre, 28 kg) fut capturé et relâché en mai 2004 dans le lac Apisko, Manitoba (Canada). Quelques écrits datés de la fin du XIXe siècle rapportent également la capture au filet de brochets géants (173–175 cm de long, 67–68 cm de large pour 41-42 kg) en Irlande, écrits dont la véracité est douteuse faute de preuves matérielles et parce qu'aucun brochet géant n'a été capturé depuis (soit plus de 50 ans).

Les jeunes brochets ont des bandes jaunes le long du corps qui, plus tard, se divisent en pointillés clairs.

Les patrons de couleurs sur les flancs varient d'un individu à l'autre mais il n'a pour l'instant pas été établi de lien clair avec son milieu de vie. En Italie, Esox cisalpinus fut longtemps considéré comme une variation de couleur du grand brochet, mais a été reconnu comme une espèce à part entière en 2011.

Ce poisson a environ 500 dents.

Chez le grand brochet, 5 pores sensoriels sont visibles sous ses mandibules inférieures contre 6 à 9 chez le maskinongé et 4 pores chez le brochet maillé. Seule la partie supérieure des opercules est écaillée tandis que la totalité de celles du brochet maillé est recouverte d'écailles.

Un hybride entre le grand brochet et le maskinongé est parfois observé là où les deux espèces co-existent. Sa livrée rappelle celle du maskinongé mais certains traits (forme de la queue notamment) sont intermédiaires. Certains de ces hybrides ont été introduits à d'autres endroits pour la pêche sportive. Il est probable que le grand brochet s'hybride également naturellement aussi avec le brochet maillé.

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Distribution

Géographie

Le Grand brochet fait partie des poissons d'eau douce ayant la plus vaste répartition naturelle au monde, comme l'omble chevalier, l'épinoche et l'épinochette. On le rencontre dans la majorité des régions tempérées et froides de l'hémisphère nord : en Europe, dans le nord de l'Asie et en Amérique du Nord. C'est un poisson plutôt nordique que l'on trouve dans les nombreux lacs et les vastes marais de la taïga arctique, dans presque l'ensemble de la Russie et du Canada, allant dans certaines régions jusqu'à la toundra. En Europe il est naturellement présent au sud jusqu'en Grèce et dans le sud-est de la France, sous climat méditerranéen. On le trouve aussi dans le nord de l'Iran (régions côtières de la mer Caspienne) et en Asie centrale. Aux États-Unis il est présent naturellement des Grands Lacs jusqu'en Arkansas et au nord du Mississippi, ainsi qu'en Alaska.

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Il a aussi été largement introduit en dehors de son aire d'origine, par exemple au Maroc par les Français au début du XXe siècle, dans les lacs d'Aguelmame Aziza et d'Aguelmame Sidi Ali.

Contrairement au sandre qui préfère les fonds des lacs, le brochet occupe principalement la première moitié de la colonne d'eau. Adulte, il affectionne les écosystèmes lentiques (rivières à courant lent, bras morts, fleuves, étangs et lacs riches en végétation). Ainsi, une étude canadienne a montré que sa présence était « directement corrélée avec la présence de barrages de castor ».

Le brochet est aussi commun en eaux saumâtres. C'est notamment le cas dans certaines régions de la mer Baltique, surtout à l'est, où la salinité est moindre et où une couche d'eau douce de plusieurs mètres surnage à l'eau salée. Les brochets vivent principalement dans cette couche d'eau douce, et font des intrusions fréquentes dans la couche salée pour s'y nourrir. Les brochets peuvent y atteindre de grandes tailles et les individus dépassant le mètre y sont très fréquents.

Dans certaines régions du monde peuplées et industrialisées, l'habitat du brochet tend souvent à se dégrader, ou a été très dégradé. S'il peut profiter d'anciennes gravières ou carrières inondées qui lui offrent des habitats de substitution, son biotope naturel est le plus souvent négativement affecté par les activités humaines (pollution de l'eau, pêche abusive, drainage ou comblement de nombreuses zones inondables, eutrophisation, turbidité accrue, artificialisation des berges, pompages excessifs d'eau, etc.). En particulier, les prairies inondables propices à sa reproduction et de nombreux milieux peu profonds servant de nourriceries ont fréquemment disparu, selon certaines études la dégradation des nourriceries aurait un impact encore plus négatif pour l'espèce que la dégradation ou régression des zones de fraie. Ceci explique la régression de l'espèce dans une grande partie de ses habitats potentiels. Une autre étude a porté sur les effets du manque d'habitats de fraie, le manque de nourriceries pour les alevins et le manque d'habitats pour les jeunes brochets. Les auteurs ont dans ce cas conclu que contrairement à une idée répandue, c'est la disponibilité en aire de fraie et d'alimentation des jeunes qui a le plus d'importance pour la survie des populations, plus que les nourriceries d'alevins. Mais selon les résultats de leurs modélisations « les habitats de fraye peuvent être les plus rares en quantité absolue ». L'étendue, mais aussi la profondeur et le profil hypsographique d'un lac influent aussi sur le nombre et la biomasse des brochets.

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Grand brochet carte des habitats
Grand brochet carte des habitats
Grand brochet
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Habitudes et mode de vie

C'est un chasseur habituellement sédentaire et solitaire, mais il vit parfois temporairement en groupe de deux ou trois.

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Dans les grands lacs, on le trouve aussi en bancs, surtout quand il s'agit de jeunes sujets. Le brochet peut vivre plus de 20 ans.

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Mode de vie
Comportement saisonnier

Régime et nutrition

L'alimentation du brochet évolue avec l'âge. Il commence par se nourrir de zooplanctons et d'insectes lorsqu'il est alevin (30 mm). En grandissant, son régime alimentaire intègre des proies de plus en plus grosses. Adulte il consomme principalement diverses espèces de poissons, notamment les espèces les plus communes dans le milieu où il vit. Le grand brochet est néanmoins très opportuniste, et il peut aussi consommer des écrevisses, des amphibiens, des canetons ou des rongeurs. La taille de ses proies peut correspondre à la moitié de sa propre taille. Le cannibalisme n'est pas rare chez le brochet et il peut arriver que les brochetons constituent la majeure partie des proies des gros brochets. En élevage, il peut être réduit par l'isolement des fratries.

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Il a été longtemps considéré comme un monstre vorace, depuis qu'on peut le filmer et l'observer dans son milieu, on sait que ce n'est pas toujours vrai. Le brochet est reconnu comme un excellent régulateur des populations de poisson fourrage.

Le brochet chasse principalement en embuscade ; il se camoufle dans les herbes aquatiques ou se confond avec des branchages immergés, et attend qu'une proie passe à sa portée. Son corps élancé n'est pas adapté à de longues poursuites mais bien aux accélérations brusques et en ligne droite. Il lui arrive parfois de s'attaquer aux poissons pris dans les lignes des pêcheurs.

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Habitudes d’accouplement

Le brochet est une espèce phytophile dont la frai survient de février à avril dans une eau dont la température est comprise entre 5 et 12 °C. La femelle pond entre 15 000 et 20 000 œufs par kilogramme de son poids (entre 3 000 et 600 000 œufs). Aucun nid n'est construit ; les œufs semblent éparpillés au hasard dans des herbiers situés près des berges. Une grosse femelle est fécondée par un ou deux mâles plus petits qu'elle.

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Les œufs sont ambre clair de 2,5 à 3,0 mm et se fixent à la végétation. Comme chez la plupart des poissons pondant un grand nombre d'œufs sans ensuite les protéger, la très grande majorité de ces œufs mourront desséchés ou mangés par d'autres animaux. Une étude a ainsi estimé la fécondité potentielle et quantifié la survie entre l'œuf et les juvéniles de l'année en sortie de frayère (« survie œufs–juvéniles ») ; cette étude a été faite dans le milieu naturel d'une part (en 1975) et en situation de niveau contrôlé des eaux d'autre part (en 1976). Dans le premier cas 3 393 juvéniles 0+ ont survécu à partir d'environ 9 210 900 œufs estimés pondus par 404 femelles. 0,037 % des œufs ont donné un brocheton d'un an. Dans le second cas, 34 062 juvéniles 0+ ont survécu (issus d'environ 8 536 800 œufs estimés pondus par 310 femelles, soit un taux de survie nettement meilleur de 0,399 % (sans doute en partie dû au contrôle de l'eau et à une crue plus forte l'année de l'expérience). Les auteurs ont noté que les alevins nés dans ces deux cas (1975 et 1976) ont été plus nombreux que la moyenne, « suggérant que la fécondité potentielle et la production de juvéniles 0+ sur les frayères ne sont pas les seuls facteurs qui déterminent l'importance du recrutement chez cette espèce ».

La croissance de l'alevin et du brocheton est rapide, lui permettant d'atteindre 30 cm en fin de sa première année, 50 cm à la fin de sa seconde, puis 10 cm par an jusqu'à 100 cm, en cas de croissance normale. Chez le brochet, le muscle créé correspond à 17 % de la nourriture ingérée : ainsi, si un brochet ingurgite 100 g de nourriture, 17 g de muscle seront fabriqués.

Les spécificités de la reproduction du brochet le rendent vulnérable à la régression des zones humides et à la pollution des zones inondables où il pond. Ce poisson recherche des herbiers situés entre 0,2 et 0,8 m de profondeur, qui doivent rester immergés durant la période de frai. Le marnage important et le manque d'herbiers au niveau des lacs de barrage entraînent des difficultés pour le brochet. Ainsi des rempoissonnements sont annuellement ou périodiquement effectués par des sociétés de pêche.

Les lieux de fraie de ce poisson ont beaucoup décliné depuis la révolution industrielle en raison de l’artificialisation des cours d'eau, du drainage ou de la pollution des zones humides (le brochet comme tous les poissons est mortellement sensible à de nombreux pesticides), souvent sans solution alternative.

La restauration de frayères par les pêcheurs ou d'autres acteurs est un pis-aller ; le retour du castor dans les petites rivières et ruisseaux (où il fait volontiers des barrages) pourrait être favorable au frai du grand brochet et à une bonne croissance de ses alevins. Le castor nord-américain et le castor eurasiatique vivaient autrefois dans la plupart des cours d'eau des zones froides et tempérées de tout l'hémisphère nord et même dans les petits cours d'eau de certains déserts (au Nouveau-Mexique et en Arizona par exemple). Ces deux espèces reconstituent depuis quelques décennies des populations respectivement en Amérique du Nord et en Europe. De nombreuses études scientifiques ont montré l'intérêt des barrages de castors pour de nombreuses espèces de poissons et d'autres espèces aquatiques (qui sont des proies pour le brochet et d'autres poissons carnivores). Là où le castor ne fait pas de barrage, il lui arrive fréquemment de creuser de petits canaux dans les milieux herbacés, canaux qui peuvent aussi être exploités par les poissons (dont pour le frai).

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Population

Effectif de la population

Évaluer le nombre de brochets et la dynamique de population de l'espèce dans les eaux turbides n'est pas aisé ; il faut alors faire appel à des techniques de pêche électrique ou de capture-marquage-recapture.

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En revanche des observateurs expérimentés peuvent produire des comptages assez précis dans les eaux très claires et pauvres en caches. Ainsi, en Alberta, une expérience d'échantillonnage systématique (de deux jours chacun) de grands brochets d'un an ou plus a été faite (en cinq séquences) en été (juin, juillet, août) dans un petit lac méromictique profond et très clair (le lac Roi, qui a une forme de grand bassin). L'estimation finale combinée a donné dans ce cas 180 ± 39 grands brochets (soit environ 23 brochets par hectare de surface de lac). Une observation subaquatique a évalué la distribution des brochets selon la profondeur et leur réponse à la présence d'un observateur. Dans ce cas, les grands brochets privilégiaient les zones de moins d'un mètre de profondeur (la méthode d'échantillonnage stratifié est donc pertinente). Les résultats de comptages variaient peu selon l'observateur et n'étaient entachés que de 4 % d'erreur de précision.

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Références

1. Grand brochet article sur Wikipédia - https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_brochet
2. Grand brochet sur le site de la Liste Rouge de l'UICN - https://www.iucnredlist.org/species/135631/133427422

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