Plecotus macrobullaris
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Plecotus macrobullaris

Oreillard montagnard, Oreillard alpin

L'Oreillard montagnard (Plecotus macrobullaris), ou Oreillard alpin, est une espèce de chauves-souris de la famille des Vespertilionidae peuplant les massifs montagneux du sud-ouest et du centre du Paléarctique, des Pyrénées au Moyen-Orient. Il mesure autour de cinq centimètres du bout du museau à la base de la queue, pour un poids de 6 à 10 g et une envergure de 24 à 30 cm. Comme tous les membres du genre Plecotus, il possède d'immenses oreilles, mesurant les trois-quarts de la longueur de son corps. Il ressemble fortement à l'Oreillard roux (P. auritus), l'Oreillard gris (P. austriacus) et l'Oreillard des Balkans (P. kolombatovici), qui partagent en partie son aire de répartition, mais se distingue notamment de ces espèces par un petit triangle charnu sur la lèvre inférieure.

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L'Oreillard montagnard se rencontre depuis le niveau de la mer jusqu'à 2 800 mètres d'altitude, mais s'il peut fréquenter les côtes et les plaines, il reste une espèce essentiellement montagnarde affectionnant les zones escarpées. Son régime alimentaire est presque exclusivement constitué de papillons de nuit, qu'il capture en milieux ouverts. Les colonies de mise-bas sont situées dans les combles ou les clochers d'églises, dans d'autres bâtiments, dans des crevasses rocheuses ou dans des éboulis. Elles comptent de quelques femelles à quelques dizaines de femelles, qui mettent-bas en juin-juillet et qui restent avec leur jeune jusqu'en septembre.

Sa morphologie intermédiaire entre celle des oreillards roux et gris a fait que cette espèce distincte est demeurée non reconnue comme telle jusqu'au début du XXIe siècle — avec l'essor des outils génétiques —, bien qu'un nom scientifique, publié en 1965, concernant les populations du Caucase russe ait été exhumé pour le désigner. Deux lignées mitochondriales majeures existent, avec une zone de contact dans les Alpes dinariques, et sont parfois traitées comme des sous-espèces distinctes, mais leur statut reste à être confirmé. Bien que la taille des populations et leurs tendances démographiques soient inconnues, l'Union internationale pour la conservation de la nature considère l'espèce comme de « préoccupation mineure ».

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Distribution

Géographie

L'Oreillard montagnard est la seule espèce de chauves-souris du Paléarctique dont la répartition est restreinte aux massifs montagneux. Il vit dans les chaînes de montagnes dans le sud-ouest et le centre du Paléarctique, ainsi que dans leurs piémonts et leurs proches environs.

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À l'ouest, sa répartition commence dans les Pyrénées, entre l'Espagne et la France,, puis couvre l'ensemble des Alpes : dans le sud-est de la France, tout le nord de l'Italie,, au Liechtenstein et en Suisse,,, en Autriche et en Slovénie. L'Oreillard montagnard est également présent en Corse, bien que sa répartition exacte soit méconnue du fait des difficultés à le différencier de l'Oreillard gris qui se trouve également sur l'île. Dans la péninsule des Balkans, la répartition de l'espèce est limitée aux Alpes dinariques, au Pinde et au mont Olympe,, et concerne les pays suivants : Croatie, Bosnie-Herzégovine, Serbie, Monténégro, Albanie, Macédoine et Grèce. Dans ce dernier pays, l'Oreillard montagnard est également présent sur l'île de Crète, où il a été capturé dans la plupart des zones montagneuses. Au Proche-Orient, l'Oreillard montagnard peuple les monts Kaçkar du nord de l'Anatolie, et les monts Taurus au sud de cette région. Plus à l'ouest, il vit dans le Grand Caucase, en Géorgie et en Russie,, et dans le Petit Caucase, en Arménie et en Azerbaïdjan. Plus au sud on le trouve dans l'Elbourz et les monts Zagros, en Iran. Enfin, une population est connue de l'Anti-Liban, en Syrie.

Une étude de modélisation de la niche écologique de l'Oreillard montagnard a montré que sa répartition semble avant tout contrainte par des facteurs topographiques plutôt que climatiques : l'espèce n'est pas principalement cantonnée aux zones montagneuses pour leur climat froid, mais pour leur topographie particulière. Ainsi, comparée à celles de tous les mammifères et oiseaux européens, la répartition géographique de l'Oreillard montagnard se rapproche beaucoup de celle d'oiseaux peuplant des zones très escarpées, comme la Niverolle alpine (Montifringilla nivalis), le Chocard à bec jaune (Pyrrhocorax graculus), le Tichodrome échelette (Tichodroma muraria), et l'Accenteur alpin (Prunella collaris). La cinquième espèce à la distribution la plus similaire est un mammifère, le Campagnol des neiges (Chionomys nivalis). L'importance relativement faible du climat se retrouve d'ailleurs dans la diversité de milieux peuplés par l'Oreillard montagnard, des montagnes extrêmement froides et pluvieuses des Alpes, aux massifs très secs et chauds du Proche-Orient. Ces terrains escarpés procurent possiblement à cet oreillard les zones rocheuses et ouvertes qui sont propices à sa technique de chasse et à l'établissement de ses colonies de mise-bas. L'Oreillard montagnard est probablement à l'origine une espèce liée aux milieux karstiques, offrant de nombreuses crevasses, éboulis et grottes. Dans le sud-est de son aire de répartition, l'espèce est communément trouvée dans des grottes, et elle est également trouvée dans les environnements calcaires dans les Pyrénées et les Balkans.

Dans les Pyrénées, le suivi télémétrique d'individus capturés en haute altitude a montré que l'Oreillard montagnard utilisait essentiellement des crevasses rocheuses comme gîte, et des éboulis pour établir ses colonies de mise-bas. À l'inverse, dans les Alpes les sites de mise-bas connus de l'espèce se trouvent systématiquement dans les bâtiments, et l'espèce est l'une des plus communes dans les combles et clochers d'églises. Cette différence est peut-être expliquée par le climat globalement plus froid dans les Alpes (de 2 °C) qui pousse les chauves-souris à privilégier la relative chaleur des bâtiments, ou par un biais de prospection favorisant la découverte des colonies dans le milieu bâti. Les cavités arboricoles ne semblent pas utilisées pour établir les colonies de mise-bas, même quand elles sont disponibles, mais la mention d'un individu mâle dans une telle cavité est connue. Pour les colonies situées dans les bâtiments, l'environnement immédiat tend à être plutôt forestier dans les Alpes, et elles sont entourées par ou proches de forêts décidues dans les Pyrénées, mais les colonies établies dans les zones rocheuses ont tendance à être situées près de prairies ou de forêts ouvertes,.

De nombreux indices directs et indirects laissent penser que l'Oreillard montagnard chasse dans les milieux ouverts, au moins dans les Pyrénées : il a été capturé chassant à proximité du sol dans les pelouses d'altitude, bien au-dessus de la limite des arbres, de nombreuses colonies sont situées loin de tout environnement forestier et la caractérisation précise de son régime alimentaire a livré des espèces de papillons de nuit typiques des milieux ouverts. En Italie, des suivis télémétriques ont également montré que l'Oreillard montagnard évitait les zones boisées. À l'inverse, en Croatie et dans les Alpes suisses, l'Oreillard montagnard a été décrit comme chassant en forêt décidue ou privilégiant le couvert végétal structuré verticalement.

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Habitudes et mode de vie

Peu de données sont connues sur l'hibernation de l'Oreillard montagnard. Seules deux mentions, d'individus hibernant dans des grottes à plus de 2 000 m d'altitude dans les Pyrénées et dans les Alpes slovènes, ont rétrospectivement été attribuées à cette espèce après sa découverte.

Mode de vie

Régime et nutrition

En Europe de l'Ouest, le régime alimentaire de l'Oreillard montagnard est essentiellement constitué de papillons de nuit (entre 87 et 98 %), notamment de la famille des Noctuidae. Il compte aussi des diptères et coléoptères,,. En Turquie, la présence de restes d'hémiptères et d'orthoptères dans les crottes a été rapportée. En plus des lépidoptères, diptères et coléoptères, les études par métabarcoding de crottes ont livré en petites proportions des araignées, hémiptères, hyménoptères et névroptères, ainsi que quelques blattes, trichoptères, dermaptères, mécoptères, orthoptères, psoques et raphidioptères. La détection génétique de mouches tachinaires (diptères de la famille des Tachinidae) provient potentiellement de la consommation par les chauves-souris de chenilles de noctuelles infectées par les larves de ces insectes parasitoïdes. De nombreux papillons de nuit disposant d'organes tympaniques, et détectant donc les cris d'écholocalisation de la plupart des chauves-souris, ont été retrouvés dans le régime alimentaire de l'Oreillard montagnard. En effet, les oreillards sont des chauves-souris dites « chuchoteuses » ou « murmurantes », connues pour émettre en chasse des cris de très faible intensité leur permettant de consommer les papillons tympanés qui les éviteraient sinon,. À l'inverse, ils utilisent leur vision et l'écoute passive de leurs proies pour les détecter et les capturer,. Par rapport aux autres oreillards partageant son aire de distribution, l'Oreillard montagnard chasse dans des milieux ouverts ou montagneux (prairies, pelouses, pentes, éboulis et habitats rocheux). Parmi les proies de son régime alimentaire reflétant bien ses préférences écologiques distinctes, on peut notamment citer les noctuelles Euxoa aquilina et Bryophila domestica, ou les géomètres Gnophos furvata, Hemistola chrysoprasaria, Horisme radicaria, Nychiodes obscuraria et Yezognophos dilucidaria.

Habitudes d’accouplement

Bien que son proche cousin l'Oreillard roux (P. auritus) soit l'espèce la plus commune sur les sites de regroupements automnaux (aussi connus sous le nom d'essaimage ou de « swarming ») où ont probablement lieu le choix des partenaires et l'accouplement, ce comportement n'est pas connu chez l'Oreillard montagnard. L'essentiel des colonies de mise-bas connues sont situées dans des bâtiments, dans les charpentes couvertes de pierre, de zinc, d'ardoises ou de bois. Les suivis télémétriques d'individus dans les Pyrénées ont cependant montré que l'espèce pouvait également établir ses sites de parturition en milieu rocheux, dans les crevasses comme dans les éboulis, en haute-montagne. En milieu bâti, les Oreillards montagnards sont très fidèles à leur site de mise-bas, qu'ils réinvestissent d'une année sur l'autre. La fidélité au gîte est un peu plus faible concernant les colonies établies dans des crevasses, et encore plus faible dans les éboulis. Le sexe et le statut reproducteur affecte aussi la fidélité des individus à leurs gîtes, les femelles allaitantes ne changeant quasiment pas de gîte, les femelles nullipares étant un peu plus mobiles et les mâles changeant de gîte quasiment tous les jours. Les colonies de mise-bas de l'Oreillard montagnard comptent généralement 5 à 25 femelles, mais des colonies comptant une centaine d'individus, jeunes compris, existent notamment en France,. Ces colonies comptent des femelles nullipares, et la présence occasionnelle de mâles a également été signalée. La mise-bas a lieu entre juin et juillet et les jeunes restent au gîte avec les adultes jusqu'en septembre.

Population

Menaces démographiques

L'Union internationale pour la conservation de la nature considère l'Oreillard montagnard comme de « préoccupation mineure », mais du fait de sa découverte récente le statut de l'espèce est toujours incertain. Dans la Directive « Habitats, Faune, Flore », l'espèce est classée en annexe IV, avec un danger actuellement difficile à estimer, mais elle est vraisemblablement menacée par la destruction de ses gîtes lors de la restauration de bâtiments. L'espèce semble abondante dans plusieurs milieux montagneux, des Pyrénées aux Alpes dinariques en passant par les Alpes, mais les effectifs exacts de même que leurs tendances démographiques sont toujours inconnus. Les analyses de marqueurs nucléaires ayant mis en évidence des différences marquées entre les populations de Corse et celle des Alpes occidentales, celles-ci forment des « unités évolutives significatives » distinctes et méritent possiblement des mesures de conservation propres. Comme l'essentiel des colonies connues dans les Alpes se situent en milieu bâti, et notamment dans les greniers et clochers d'églises qui offrent des abris chauds dans un climat très froid, la conservation et la gestion de ces sites de mise-bas pourraient être localement essentielles pour la préservation de l'espèce. La protection de l'Oreillard montagnard passe également par celle de ses terrains de chasse comprenant des habitats diversifiés (prairies, friches, haies vives, lisières…) qui lui fournissent les lépidoptères constituant l'essentiel de son alimentation.

Références

1. Plecotus macrobullaris article sur Wikipédia - https://fr.wikipedia.org/wiki/Plecotus_macrobullaris
2. Plecotus macrobullaris sur le site de la Liste Rouge de l'UICN - https://www.iucnredlist.org/species/136229/22002229

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